chronique du 19 mars 2010
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Les dépenses de la Défense augmentent, échappant au budget minceurLes dépenses de la Défense nationale du Canada augmentent, atteignant 21,185 milliards $ en 2009-2010; ce qui place le Canada au 13e rang mondial, et au 6e rang parmi les pays de l’OTAN. Depuis le début de la guerre contre le terrorisme dans le monde, en 2001, le Canada a augmenté successivement les dépenses de la Défense nationale pour atteindre 23,1 milliards $, dont la moitié, en gros, ont été dépensés en Afghanistan. Aux termes de la Stratégie de défense Le Canada d’abord, du gouvernement conservateur, le Canada s’est engagé à augmenter ces dépenses. Le Canada prévoit dépenser 490 milliards $ en dépenses militaires au cours des 20 prochaines années. www.stopponslesdepensesmilitaires.com/site/campagne/nouvelles Le Canada complice de tortureLe Canada doit prendre des mesures concrètes pour mettre fin à la complicité de torture en arrêtant les transferts de prisonniers en Afghanistan et en convoquant une enquête publique pour examiner les politiques et les pratiques canadiennes relatives aux prisonniers en Afghanistan depuis 2002. Le gouvernement doit demander le rapatriement d'Omar Khadr de Guantanamo Bay. Il doit offrir des excuses et des indemnisations à Abdllah Almalki, Ahmad Abou Elmaati et Muaayed Nureddin en compensation des violations de droits humains qu'ils ont subies. Le processus de certificat de sécurité en matière d'immigration doit être aboli et la loi canadienne, amendée afin de prohiber toute déportation dans les cas qui présentent de sérieux risques de torture. Amnistie internationale, le 1er mars 2010 Texte biblique : Ésaïe 31, 1-3 et Michée 5, 9 et 6, 1-3
La terre est un don pour la vie des peuples, non pas une marchandiseNous célébrons le 24 mars le 30e anniversaire du martyre de l’archevêque de San Salvador, Oscar Romero, assassiné en pleine guerre civile. L’occasion est unique de relire les homélies de ce prophète des Amériques dans le contexte actuel de militarisation. Romero fut abattu alors qu’il célébrait la messe. La veille, dimanche des rameaux, il avait prêché à la cathédrale ce qu’il soupçonnait devoir être sa dernière homélie. Il concluait ainsi au milieu des applaudissements nourris de l’assemblée : « Cette semaine on m’a averti que je suis sur la liste de ceux qui seront éliminés la semaine prochaine. Que mon sang soit semence de liberté et le signe que l’espérance deviendra bientôt réalité. […] Je voudrais lancer un appel de manière spéciale aux hommes de l’armée, et concrètement, aux bases de la garde nationale, de la police, des troupes. Frères, vous faites partie de ce même peuple, vous tuez vos propres frères paysans, et face à un ordre de tuer donnée par un homme, doit prévaloir la loi de Dieu qui dit de ne pas tuer… Aucun soldat n’est obligé d’obéir à un ordre à l’encontre de la loi de Dieu… Une loi immorale, personne ne doit l’observer. Le moment est venu de récupérer votre conscience et d’obéir d’abord à votre conscience plutôt qu’à un ordre de péché…. L’Église, défenderesse des droits de Dieu, de la loi de Dieu, de la dignité humaine, de la personne, ne peut se taire devant autant d’abomination. Nous voulons que le gouvernement prenne au sérieux le fait que les réformes ne servent à rien si elles arrivent trempées dans autant de sang. Au nom de Dieu, donc, et au nom de ce peuple accablé dont les lamentations montent vers le ciel de plus en plus tumultueuses, je vous supplie, je vous demande, je vous ordonne au nom de Dieu : Cessez la répression! » (Romero, 23/03/80) Jon Sobrino, théologien, conseiller et ami de l’évêque affirme que « Romero a été un prophète dans la ligne des grands prophètes d’Israël, lesquels ont culminés en Jean Baptiste et Jésus de Nazareth ». La prophétie, en effet, est un trait fondamental et irremplaçable de la foi judéo-chrétienne. Le prophète prononce une parole concrète, historique, qui dénonce et démasque le péché social du peuple et de ses responsables, il annonce les conséquences funestes de ces comportements, exige une conversion et annonce l’espérance d’un avenir meilleur. Voilà un trait pratiquement banni des homélies actuelles : on omet systématiquement les références à l’actualité, à la réalité sociale pour se confiner dans un langage abstrait qui répète de vieux textes évangéliques sur un ton moralisateur et conciliant. Le prophète nomme un chat un chat. « Je dénonce avant tout l’absolutisation de la richesse. Voilà le grand mal du Salvador : la richesse, la propriété privée, comme un absolu intouchable. Malheur à celui qui touche ce câble à haute tension! Il se brûle... » (Romero 12-08-79) Romero insistait cependant; il ne voulait pas tenir un discours politicien. L’inspiration qui le poussait à parler, c’était la parole de Dieu qui juge l’Histoire sans oublier personne : jugement sur le peuple, sur les responsables politiques, le système judiciaire, la religion aliénée et aliénante, l’armée… Il reproche aux militaires d’être au service des riches qui contrôlent le pays. Le péché des militaires, c’est « l’instrumentalisation de l’oligarchie, qui a la mauvaise habitude de manipuler l’armée à son goût pour défendre ses intérêts contre le peuple ». (Romero 06-01-80) Romero énumérait dans son homélie dominicale la longue liste des victimes de la violence, il nommait patiemment les noms des personnes assassinées ou torturées. Dans ce pays convulsionné, l’évêque était pratiquement la seule voix qui dénonçait publiquement les massacres; son homélie transmise par la radio de l’évêché retentissait partout en Amérique centrale, au moment où les États-Unis assumaient un rôle de soutien militaire intensif auprès des dictatures du Salvador, du Guatemala et du Honduras et contre le gouvernement révolutionnaire au Nicaragua. Romero écrivit une lettre ouverte au président américain Jimmy Carter où il lui rappelle que s’il se dit chrétien, il ne peut continuer à envoyer de l’aide militaire au gouvernement salvadorien : « L’aide que les États-Unis peut nous donner militairement ne fera que renforcer les oppresseurs du peuple… cela servira a réprimer le peuple avec plus de d’assurance. Je vous demande que si vraiment vous voulez défendre les droits humains, vous interdisiez que l’on donne de l’aide militaire au gouvernement salvadorien. » (Romero 17-02-80) Tous les prophètes de la bible ont eu cette position face aux armées et à la guerre. Esaïe, devant les menaces de l’empire assyrien, rappelle au roi Ézéquias l’importance de ne pas faire d’alliances avec les empires puissants et ne pas craindre leur pouvoir idolâtrique (Es 36-37). Le prophète rappelle les guerres de Yahvé où, sans combattre, Israël a été sauvé par son Dieu. C’est ainsi que l’armée du pharaon fut engloutie dans la Mer des roseaux alors qu’elle poursuivant la horde d’esclaves qui allait devenir un peuple libre. « Je veux chanter en l'honneur du Seigneur : il a remporté une victoire éclatante, il a jeté à la mer chevaux et cavaliers! » (Ex 15,1) La guerre n’est pas le chemin pour la paix. Romero rappellera continuellement le cinquième commandement du décalogue : « Tu ne tueras pas », un texte bref et incontournable. La vie humaine est sacrée. « Tu ne tueras pas! », même si tu conduis un char d’assaut ou si tu manipules des fusils de gros calibre. » (Romero 18-03-79) Les armes sont faites pour tuer; en faire usage ou en faire le commerce tombe sous la loi de Dieu « Tu ne tueras pas! » Et la torture banalisée de nouveau durant l’ère Bush et pratiquée systématiquement en Irak et en Afghanistan est aussi un acte homicide. « Puisse Dieu m’entendre, ces hommes qui ont les mains tachées par un homicide, ils sont nombreux, malheureusement, parce qu’est homicide également celui qui torture. Celui qui commence à torturer ignore où cela va se terminer. » (Romero 18-03-79) Je n’ai pu m’empêcher, en relisant avec émotion les homélies d’Oscar Romero, de me demander pourquoi il n’y a plus de prophètes parmi nous? Notre gouvernement est en train de tripler les dépenses militaires et dans son document stratégique Le Canada d’abord, les raisons en sont évidentes. Il s’agit de favoriser les producteurs d’armes et d’augmenter nos exportations. Au lieu de nous centrer sur les missions de paix, comme auparavant, nous allons maintenant à la vraie guerre, tuer des Talibans. Le gouvernement sait qu’il n’y a pas de solution militaire en Afghanistan, mais nous sommes alignés sur les intérêts guerriers des États-Unis. Où cela nous conduira-t-il? 490 milliards en 20 ans pour l’armée alors que l’on proclame l’austérité à cause de la crise économique. Vraiment, que Dieu suscite chez nous un prophète comme Romero pour dénoncer ce commerce de la violence et de la mort. Je suis scandalisé par l’attitude du gouvernement qui refuse de faire la lumière sur la complicité des gouvernements canadiens face à la torture pratiquée en Afghanistan. Et ce qui me scandalise encore plus, c’est le silence et l’indifférence face à de telles horreurs. Saint Romero des Amériques, priez pour nous!Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.
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