chronique du 5 décembre 2008
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Crise économique et inégalités socialesLes inégalités, racine de la crise économiquepar Philippe Langlois […] Aucune mesure, aussi radicale soit-elle, ne sera efficace pour contrer la profonde récession qui arrive si elle n'est pas accompagnée d'un effort soutenu et réel de redistribution des richesses. L'actualité à la lumière de la Bible
CommentaireConnaissez-vous Élie, le Tishbite? Un fou de Dieu qui refusait une société prospère sous prétexte qu’elle avait pour base « l’économie, d’abord ». Nous sommes en 885 avant notre ère, c'est-à-dire il y a 2893 ans. C’est comme si c’était hier, juste avant l’ouragan qui s’abat présentement sur l’économie mondiale. En effet, en cette année de disgrâce 885 av. J.C. un coup d’état militaire porte le général Omri au pouvoir dans le petit royaume d’Israël. Homme énergique, il amorce un développement économique tellement rapide qu’en quelques années il réussit à jeter les bases d’une grande prospérité. Il fonde une nouvelle capitale, Samarie, développe le commerce international avec les Phéniciens par les ports de Tyr et de Sido, construit des routes, exploite des mines de cuivre, modernise son armée en lui procurant des chars de combat et réussit à améliorer les relations entre les Israéliens et les Cananéens qui se partageaient la terre. Son fils Achab hérita en 874 d’un petit royaume puissant, avec de grandes cités, un développement culturel impressionnant, un goût raffiné pour le luxe, d’immenses fortunes accumulées et une ouverture aux cultures païennes des Cananéens et des Phéniciens. Mais ce miracle économique avait un prix social et provoquait une crise profonde dans la société israélite. On y perdait son identité. Accoutumés à vivre librement à l’intérieur des ses clans une vie paysanne simple et fraternelle, l’Israélite se voyait dépouillé de ses terres par le biais de l’endettement et appauvri par l’augmentation des prix des denrées. Les paysans se retrouvaient obligés de vendre leur travail aux nouveaux maîtres du pays. Le Dieu d’Israël, qui avait libéré les esclaves d’Égypte autrefois était remplacé par Baal, le dieu de l’argent et de l’oppression. Des milliers de prophètes proclamaient bien haut les bienfaits du nouveau modèle économique et la foi en un Dieu qui veut la liberté pour son peuple disparaissait. La grande majorité se prostituait en se vendant pour un peu de bien-être économique. Élie le Tishbite, venu des montagnes de Galaad, descend en ville pour s’opposer seul au projet économique du roi. L’affrontement est terrible et Élie est perpétuellement menacé de mort. « Te voilà, toi, le fauteur de troubles en Israël » lui lance Achab du haut de son pur-sang. Le développement du pays se fait au détriment des petits agriculteurs qui ont perdu leurs terres au profit de grandes propriétés possédées par une poignée de puissants. Élie demande à Dieu de détruire l’économie prédatrice du roi et commande une sécheresse de trois ans. Le temps de ruiner le système. Mais quand il y a crise économique, les pauvres sont les premiers à en souffrir. Alors Dieu devra prendre soin des humiliés de la terre et leur aider à survivre durant ces temps si durs. Élie lui-même finit par pâtir de la sécheresse et Dieu l’envoie dans le pays voisin, à Sarepta, ville phénicienne, chez une veuve pauvre à qui il demande l’hospitalité. La femme est au bord de la famine, avec une galette et un pichet d’eau. Elle se voit mourir elle et son fils. C’est pourtant chez cette femme étrangère, pauvre et frappée par le malheur qu’une nouvelle économie va surgir. Par le partage de son pain de misère et d’un peu d’eau, elle réalisera le miracle de la multiplication des pains. Ces histoires bibliques sont des miroirs de sagesse qui nous permettent de relire avec espérance et audace ce qui nous arrive aujourd’hui. Le modèle économique ultra-libéral qu’on nous impose depuis plus de trente ans s’écroule aujourd’hui. Les puissants de ce monde veulent sauver « leur » monde, « leur » économie. Ils renflouent les institutions financières à coup de centaines de milliards, ainsi que les grandes compagnies d’automobiles et les banques. Mais le sauvetage, nous le savons, se fait par des mises à pied, des réductions de salaire. Les travailleuses et les travailleurs ne sont que des pions dans ce modèle économique. On spécule sur la nourriture, on transforme l’agriculture pour fabriquer du carburant pour les automobiles des pays riches en affamant des milliards d’être humains. Ce qui se passait il y a presque trois mille ans dans le très petit royaume d’Achab n’était rien à côté d’une économie mondialisée qui suce jusqu’à la mort le sang des peuples. C’est pourtant chez les petits de ce monde, ceux et celles qui, comme la veuve de Sarepta, savent partager le peu et le rien qu’ils détiennent par solidarité, c’est chez ces pauvres qui s’unissent et s’organisent que nous devons chercher les solutions. En Afrique, en Asie, en Amérique latine, dans les Caraïbes et parmi les couches pauvres des sociétés industrialisées, cherchons les prophètes qui annoncent un monde nouveau. Il y en a partout qui se tiennent debout, au prix de leur vie, pour défendre la Vie des peuples. Et relisons avec attention ces merveilleux textes des livres des Rois de la bible où l’on nous enseigne comment résister à une économie prédatrice en pleine crise. Qu’Élie soit notre inspiration et que son Souffle anime les croyantes et les croyants. Que la crise économique soit l’occasion de retourner à une société mondiale où le slogan sera les personnes d’abord… OUI ! Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.
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