La vie du Christ, triptyque de Keith Haring, église Saint-Eustache (Paris).

Naissance, mort et résurrection selon Haring

Jimmy CarbonneauJimmy Carbonneau | 11 décembre 2017

Cette œuvre de Keith Haring est la dernière de l’artiste, créée à peine deux semaines avant de mourir des complications du SIDA en 1990. Ce triptyque appelé « La vie du Christ » est façonné d’une pièce en bronze recouverte de feuilles d’or blanc, un médium très peu utilisé au cours de sa carrière. Elle permet une vision de la mort et de la résurrection de Jésus ainsi qu’une réflexion sur la mort et la résurrection ou du moins, de son espérance, de l’artiste.

Un renversement de perspective

Haring opère un renversement de son rapport à la mort avec cette dernière œuvre. En effet, on observe que ses dessins antérieurs de la mort du Christ ne présentent que la crucifixion (voir l’image plus bas) alors que La vie du Christ, non seulement laisse peu de place à la crucifixion, mais explore principalement la résurrection, l’amour et la lumière comme étant le cœur de la vie de Jésus. À l’aube de sa vie, l’artiste passe de Jésus crucifié au Christ glorieux.

Crucifixion et chiens qui jappent

Une œuvre antérieure du même artiste : Crucifixion et chiens qui jappent

Résurrection ou transformation

D’une façon similaire aux récits bibliques de la résurrection de Jésus (Mt 28,1-10; Mc 16,1-8, et Lc 24,1-10) et du tombeau vide en Jn 20,1-10, l’artiste n’affirme pas une résurrection au sens strict de la réactivation du corps physique qui est mort, mais d’une transformation et d’une existence au-delà de la mort, à tout le moins, un prolongement de l’œuvre à travers son héritage; un héritage qui dépasse la dimension matérielle.

Le triptyque peut être analysé selon les deux axes. À la verticale, la partie supérieure présente Jésus et son œuvre et la partie inférieure, le peuple. À l’horizontale, à partir de la gauche, deux anges dont un à l’envers et peu de rayons allant jusqu’à la foule. La pièce centrale est le cœur de l’histoire avec l’Enfant Jésus radiant à l’intérieur de lui-même adulte et ressuscité sur la croix avec ses treize bras, peut-être pour inclure Paul comme apôtre, et au centre de lui-même un cœur qui pleut des gouttes d’amour sur les personnes humaines. Il y a beaucoup de rayons jusqu’à la foule. De plus, il y a un soleil radieux. Les bras des gens semblent exprimer une joie, une certaine euphorie. Dans la partie de droite, les deux anges sont debout et les rayons vont jusqu’au peuple. On pourrait ainsi lire de gauche à droite un peuple qui refuse la mort de Jésus et ne peut pas croire en cette fin tragique. Au centre, la résurrection de Jésus perçue, vécue et espérée du peuple et de l’artiste, et à gauche, l’espérance et la plénitude de la résurrection de Jésus accessible à tous.

Bref, l’œuvre « La vie du Christ » de Keith Haring est une interprétation contemporaine de la mort et de la résurrection du Christ. Cette œuvre présente une exégèse contemporaine de la résurrection et de la vie du Christ. À l’aube de sa vie, ce retable religieux constitue une expression vivante de la foi et de l’espérance de l’artiste en Jésus-Christ où son adhésion et sa foi passent d’un Jésus crucifié au Christ glorieux.

Dessiné pour la première fois au Club 57 de New York, un repère pour artistes visuels des années 1980, l’enfant rayonnant, « radiant » en anglais (Radiant Baby), représente la vie, la joie et l’espoir pour le futur. À l’occasion de Noël, nous sommes invités, à l’image de Keith Haring, et du tableau principal, de voir cet enfant comme porteur du Christ non pas crucifié, mais glorieux, porteur de vie, de joie et d’espoir pour le futur.

Jimmy Carbonneau est étudiant à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval (Québec).

rosette

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