Saint Paul. Vincenzo Gemito, 1917. Gallerie di Piazza Scana. (photo : Wikipedia)
Sarcasme et mutilation génitale...
Sébastien Doane | 26 novembre 2018
Le sarcasme est une forme d’humour mais il est souvent même amer et blessant. Retrouve-t-on cette forme d’ironie piquante ou belliqueuse dans la Bible? Eh oui! Une lettre de Paul montre un exemple clair de ce genre d’humour noir qui frappe en bas de la ceinture...
Dans la lettre aux Galates, Paul réagit vivement à la visite troublante de certaines personnes qui « annoncent un Évangile différent ». Paul enseigne que le salut vient de la foi en Jésus et non du respect de la Loi juive. Il est donc révolté par ceux qui tentent d’imposer la circoncision à la communauté qu’il a mise sur pied. À la fin de ses arguments contre l’application de la circoncision aux non-juifs, Paul utilise le sarcasme contre ses adversaires en Ga 5,12.
La traduction de Louis Second est un bon exemple de la traduction traditionnelle : « Puissent-ils être retranchés, ceux qui mettent le trouble parmi vous! » Traduite de cette façon, la phrase de Paul indique que ses adversaires doivent être retranchés de la communauté. L’argument ne manque pas d’ironie : ceux qui veulent couper les prépuces des nouveaux chrétiens devraient être eux-mêmes retranchés de la communauté.
Or, les traductions contemporaines ont maintenant tendance à favoriser une interprétation plus littérale et plus tranchante...
« Qu’ils aillent donc jusqu’à se mutiler tout à fait, ceux qui sèment le désordre parmi vous! »
Avec cette traduction, l’ironie devient sarcasme. Paul souhaite que ceux qui veulent que les prépuces des nouveaux chrétiens soient coupés soit eux-mêmes castrés!
L’argument est aussi clair que brusque : vous souhaitez couper les prépuces des autres, moi je souhaite que votre appareil génital soit entièrement coupé! Comme on dit au Québec, Paul n’y va pas avec le dos de la cuillère...
Sébastien Doane est professeur d’exégèse biblique à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval (Québec).