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chronique du 10 avril 2015
 

Des zombies à Jérusalem

La vision d'Ézéchiel

La vision d'Ézéchiel, 1630
Francisco Collantes (1599-1656)
Huile sur toile, 177 x 205 cm
Musée du Prado (Madrid)
(photo : Wikimedia)

La mort/résurrection de Jésus est racontée de façon différente, dans les quatre évangiles. Beaucoup d’éléments se recoupent, mais il y a des détails assez intéressants qui donnent du relief et de la singularité à chaque récit. Voici l’histoire de la mort de Jésus selon Matthieu. Depuis que la culture populaire parle de « zombies », ce récit gagne en actualité.

Jésus, criant de nouveau d’une voix forte, rendit l’esprit. Et voici que le voile du sanctuaire se déchira en deux du haut en bas; la terre trembla, les rochers se fendirent; les tombeaux s’ouvrirent, les corps de nombreux saints défunts ressuscitèrent : sortis des tombeaux, après sa résurrection, ils entrèrent dans la ville sainte et apparurent à un grand nombre de gens. À la vue du tremblement de terre et de ce qui arrivait, le centurion et ceux qui avec lui gardaient Jésus furent saisis d’une grande crainte et dirent : « Vraiment, celui-ci était Fils de Dieu. » (Matthieu 27,50-54)

Les morts ressuscitent

     La mort de Jésus engendre toutes sortes de phénomènes apocalyptiques : le voile du Temple se déchire, un tremblement de terre fend les rochers et ouvre les tombeaux! Des morts se relèvent et marchent dans Jérusalem. Cette façon de raconter la scène est proche du film d’horreur. Quelle a été la réaction des gens de Jérusalem? Le texte ne le dit pas, mais la réaction d’un lecteur d’aujourd’hui peut passer de la peur au rire, puisque ce récit brise les limites du possible. Les lois de la nature semblent temporairement suspendues puisque des vivants se relèvent d’entre les morts.

     Remarquons qu’il s’agit d’un récit. Et lorsqu’un lecteur lit un récit, il accepte de mettre en veilleuse ses incrédulités pour entrer dans le monde de ce récit. C’est ainsi que l’on peut se laisser prendre par des films, même si leur trame narrative ne tiendrait pas la route dans la vraie vie. Bref, lorsque le lecteur arrive au chapitre 27 de Matthieu, il peut choisir d’accepter cette manifestation de « zombies » et la considérer comme une façon imagée de montrer l’importance de ce qui est en train de se passer : Jésus, le Messie, vient de mourir.

     Le texte ne dit rien de la nature du phénomène. S’agit-il simplement d’une réanimation comme pour Lazare? Vont-ils devoir mourir à nouveau? Ou s’agit-il d’une résurrection finale? Au lieu d’être avec Dieu, les morts relevés se promènent à Jérusalem, un lieu qui est associé à la mort, depuis le début de l’Évangile de Matthieu…

Un arrière-plan biblique

     L’ouverture des tombeaux est peut-être liée à la parabole des ossements desséchés, en Ézéchiel 37,12-13 : « Je vais ouvrir vos tombeaux; je vous ferai remonter de vos tombeaux, ô mon peuple, je vous ramènerai sur le sol d’Israël. » Ce texte montre l’ouverture des tombeaux comme un symbole du retour du peuple d’Israël, après l’exil à Babylone. De façon similaire, le tremblement de terre peut nous orienter vers le texte de Zacharie 14,4-5, dans lequel l’arrivée des saints du ciel provoque un tremblement de terre et l’effondrement du mont des Oliviers, ces événements annonçant le jugement final de Dieu. Ces deux textes de l’Ancien Testament sont un arrière-plan utile pour mieux comprendre le récit de Matthieu.

Signes apocalyptiques, signes de vie

     Les signes apocalyptiques de ce récit sont une anticipation de la fin des temps et de la résurrection des morts. La conviction des chrétiens est que la crucifixion n’est pas une catastrophe, mais une victoire. Tous les bouleversements décrits par le texte témoignent de la grandeur de l’événement de la mort-résurrection de Jésus. Paradoxalement, la mort de Jésus est source de vie. Elle rend possible la résurrection. Ce récit nous oriente déjà vers le matin de Pâque, dont le récit sera fait au chapitre suivant de l’évangile. Il ne devrait pas provoquer un sentiment d’horreur, puisqu’il est signe d’espoir. D’ailleurs, le centurion et les soldats qui assistent à la scène ressentent à la fois une grande crainte et la conviction que Jésus est le Fils de Dieu.

Sébastien Doane

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Qui a porté la croix : Jésus ou Simon ?