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chronique du 11 septembre 2009
 

On cite la Bible plus souvent qu’on ne le pense

La langue française comporte beaucoup d’expressions ayant leur origine dans la Bible. On en entend et on en utilise à peu près chaque jour. En voici quelques-unes avec des liens hypertextes permettant de les relire dans leur contexte biblique*.

* La traduction de la Bible en français courant à laquelle renvoit les liens hypertextes ne maintient pas toujours la forme du texte biblique. N'hésitez-pas à consulter aussi d'autres traductions.

Samson

Samson enlève les portes de Gaza (Jg 16,1-3)
(gravure : Gustave Doré)

     Certaines expressions à connotation biblique sont très connues : être fort comme Samson, dont la force était une énigme (Jg 16,4-21), agir en bon Samaritain, comme celui de la célèbre parabole (Lc 10,30-37), prendre une année sabbatique, en référence au jour de repos obligatoire (Ex 20,9-10) ou faire des jérémiades, du nom du prophète à qui on a longtemps attribué le livre des Lamentations (Lm 1,1ss).

     Beaucoup d’expressions sont évidemment tirées des évangiles, comme s’en laver les mains, en référence à Pilate qui se dissocie de la condamnation de Jésus (Mt 27,24), ou encore pleurer comme une Madeleine, dont le lien avec le personnage n’est pas évident (Lc 7,37-47). Plusieurs sont même tirées de propos attribués à Jésus : beaucoup d’appelés, peu d’élus (Mt 22,14), rendre à César ce qui appartient à César (Mc 12,14-17), jeter la première pierre (Jn 8,7), crier sur les toits (Mt 10,27), ne pas jeter des perles aux cochons (Mt 7,6), la paille et la poutre (Mt 7,3).

     Mais l’origine biblique de beaucoup d’expressions n’est pas toujours connue : qui sème le vent, récolte la tempête (Os 8,7), chaque chose en son temps (Qo 3,1.17), séparer le bon grain de l’ivraie (Mt 13,24-30). Il faut dire que toutes n’ont pas une sonorité biblique : une arme à double tranchant (Pr 5,4), le nombril du monde (Jg 9,37; Ez 38,12), se mordre les lèvres (Pr 16,30), n’avoir que la peau sur les os (Ps 102,4-6), être blanc comme neige (Ps 51,9 et ailleurs).

     Plusieurs expressions sont des citations directes, elles viennent tout droit de la Bible : rien de nouveau sous le soleil (Qo 1,9), deux poids deux mesures (Pr 20,10), pour une bouchée de pain (Pr 28,21). D’autres ne se retrouvent pas telles quelles dans la Bible mais sont plutôt inspirées de passages ou de thèmes bibliques : un paradis terrestre (Gn 2,8), un colosse aux pieds d’argile (Dn 2,31-45), discuter sur le sexe des anges (Mc 12,25), apporter sur un plat d’argent (Mt 14,6-12).

     Adam et Ève, les premiers humains, sont l’objet d’expressions bien connues : être en costume d’Adam, ne connaître ni d’Ève ni d’Adam, ou encore, la fameuse pomme d’Adam. Mais d’autres personnages bibliques ont su inspirer des expressions : vieux comme Mathusalem, le grand-père de Noé mort à 969 ans, dernier personnage biblique à vivre aussi longtemps (Gn 5,27); pauvre comme Job, dont le livre biblique du même nom raconte comment Dieu a éprouvé cet homme intègre; le baiser de Judas, ce geste d’amitié qui cache la trahison (Mc 14,44-46).

     D’autres expressions de la langue française sont issues de la Bible par le biais de la Vulgate, la Bible traduite en latin. Ainsi avoir la tête dure est la traduction latine d’une expression hébraïque qui se traduit littéralement par « avoir la nuque raide » et qui désigne, dans la Bible, celui qui refuse de baisser la tête, c’est-à-dire, de se soumettre. Ainsi, les Israélites qui refusent de mettre leur confiance en Yahvé sont qualifiés par Moïse de « peuple à la nuque raide » (Ex 32,9 et ailleurs).

     Il y aussi des expressions qui sont utilisées dans un sens bien différent de celui qu’il a dans la Bible. Qu’on pense au terme capharnaüm, qui signifie aujourd’hui « endroit en désordre »; on voit difficilement le lien avec la ville mentionnée dans les évangiles et où Jésus a résidé (Mt 4,13-15); peut-être l’expression a-t-elle pris ce sens par rapprochement avec un terme semblable en ancien français (« cafourniau » : « débarras obscur »). Quant au mot holocauste, qui désigne dans la Bible le sacrifice d’un animal brulé en entier sur l’autel en offrande à Dieu (voir Ex 29,18 et ailleurs), son utilisation aujourd’hui pour désigner le massacre de millions de Juifs par les nazis crée un contresens épouvantable. D’ailleurs les Juifs eux-mêmes préfèrent utiliser le terme hébreu « shoah », qui signifie littéralement « catastrophe ».

     Notre vocabulaire aussi comporte des mots qui trouvent leur origine dans la Bible. Le terme sémite, par exemple, tiré du nom d’un personnage biblique, Sem, un des trois fils de Noé, et qui désigne les populations issus du groupe ethno-linguistique dont font parti les Juifs et les Arabes (Gn 10,21-32). L’expression tohu bohu vient aussi de la Bible; on la retrouve même telle quelle en hébreu dans le texte de la Bible, bien qu’elle soit souvent traduite en français par « informe et vide » (Gn 1,2).

     Que notre langue emprunte à la Bible n’est pas si surprenant. La Bible, par le biais du christianisme, a influencé différences facettes de la société occidentale, y compris notre façon de parler.

Chrystian Boyer

Chronique publiée en collaboration avec la Société catholique de la Bible (SOCABI).

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