Les soldats romains rapportant leur butin à Rome, dont la menorah du Temple, après la première guerre de Judée. Arc de Titus érigé par son frère Domitien en 81 de notre ère.
La destruction du Temple de Jérusalem et le Nouveau Testament
Sylvain Campeau | 24 septembre 2018
Quelles sont, dans le Nouveau Testament, les références claires à la destruction du temple à Jérusalem (en 70 de notre ère)? Et s’il n’y en a pas, pourquoi persistez-vous à dater la rédaction du dit Testament après cet événement cataclysmique pour la communauté initiale? (Étienne)
Je ne pense pas qu’il soit possible de lire, sur notre site web, que la rédaction du Nouveau Testament est survenue après l’année 70 de notre ère. Les 27 textes qui composent le Nouveau Testament forment une bibliothèque dont la datation s’étend sur plusieurs décennies. En d’autres termes, la question de la datation des textes est un problème à résoudre pour chacun des écrits et les solutions proposées par les spécialistes sont des probabilités basées sur l’analyse interne de chaque texte et sur des sources externes. Quand on parle de datation des textes anciens, nous ne sommes donc jamais dans le domaine des certitudes. De plus, le texte le plus ancien de ce corpus littéraire, 1 Thessaloniciens, est daté entre 50 et 52, donc une vingtaine d’années avant la destruction du Temple.
La ruine du Temple
Dans le Nouveau Testament, les premières allusions à la destruction du Temple se trouvent dans les évangiles synoptiques quand Jésus annonce la ruine du sanctuaire : Marc 13,1-4; Matthieu 24,1-3; Luc 21,5-7. Cette prédiction deviendra une accusation portée contre lui dans le récit de la passion (Mc 14,58 et 15,29 par exemple).
Deux autres allusions se trouvent dans les Actes des Apôtres : « Le Dieu qui a créé l’univers et tout ce qui s’y trouve, lui qui est le Seigneur du ciel et de la terre, n’habite pas des temples construits par la main des hommes. » (Ac 17,24; voir aussi 7,48-49) Cette affirmation suppose la destruction du sanctuaire de Jérusalem et soutient l’interprétation chrétienne voulant que le nouveau Temple soit l’Église : « Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous? » (1 Co 3,16; voir aussi 2 Co 6,16 et 1 P 2,5)
Une catastrophe
Toutes ces passages bibliques ne sont probablement pas des références claires d’un point de vue historique. Mais il est certain que la destruction du Temple a demandé au judaïsme de se réorganiser après la catastrophe. Le seul élément qui change radicalement après 70, c’est la disparition du temple de Jérusalem et du culte sacrificiel dirigé par la caste sacerdotale.
On attribue généralement la réorganisation du judaïsme aux rabbins issus du mouvement pharisien. Les rabbins donneront une place centrale à la torah, aux réunions synagogales et au messie à venir. Mais ces trois éléments ne sont pas des nouveautés découlant de la catastrophe de 70 et trouvent leurs racines aux IIe et Ier siècles avant notre ère. Les rabbins ont donc simplement effectué un déplacement vers ces trois pôles qui sont devenus, et qui demeurent, des piliers du judaïsme.
Diplômé de l’Université de Montréal, Sylvain Campeau est bibliste et responsable de la rédaction.