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Comprendre la Bible
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chronique du 5 juin 2009

 

Paul, en ville et en route

Saint Paul prêchant à Athènes

Saint Paul prêchant à Athènes selon Raphaël
carton de tapisserie, 442 x 342 cm, c1514-1515
Victoria and Albert Museum, Londres

L’année paulinienne a permis à plusieurs de découvrir ou re-découvrir la surprenante actualité de Paul de Tarse. Disciple de Jésus, missionnaire, pasteur et théologien, il a su toucher des gens aux trois étapes du processus d’évangélisation : l’éveil, l’initiation et l’approfondissement. Aujourd’hui, en cette période de l’Église où la formation à la vie chrétienne est une priorité, les approches de Paul demeurent inspirantes. J’en signale quelques éléments.

L’attention à la culture

     Paul et ses proches ont fait face à un nouveau défi missionnaire, que Jésus lui-même a peu connu. Comment transmettre la Bonne Nouvelle à des païens qui n’ont pas au point de départ, comme le peuple juif, une histoire commune, des Écritures, une foi au Dieu unique et une Loi morale partagée? La mission de Paul s’est concentrée sur le monde urbain de culture grecque, celui des grandes villes cosmopolites et organisées, avec leur mode de vie et leur mentalité, une diversité de cultes religieux et de courants philosophiques. Paul connaît bien cet univers, ses réseaux de communication, son langage et ses sensibilités, ses quêtes spirituelles et morales, avec leurs fermetures et leurs ouvertures. Il prend en compte les atouts et les obstacles de cette culture pour éveiller, initier et inviter à aller plus loin. Son usage du vocabulaire sportif, plutôt unique dans la Bible, exprime bien le souci d’inculturation en ces régions où les Olympiques sont nées. Nous sommes aujourd’hui en situation de mission, dans un univers complexe et mobile. Paul s’y sentirait à l’aise et serait à l’affût des réseaux et des relais, favorisant le passage de l’Évangile d’une culture à une autre.

Le fonctionnement en équipe

     Autant pour l’annonce de l’Évangile que pour le soutien des communautés, Paul ne fonctionne pas seul. C’est un homme d’équipe. Il porte la mission avec des hommes, des femmes, des couples, auxquels il est très attaché. En Rm 16, plusieurs de ces noms sont mentionnés, dont certains sont qualifiés d’apôtres, i.e. d’envoyés, terme que Paul utilise pour lui-même. Certaines lettres de Paul, souvent nous ne le remarquons pas, sont envoyées par une équipe pastorale : Paul, Sylvain et Timothée, Paul et Sosthène. Le modèle communautaire est celui de groupes retreints, demandant participation et engagement de chacun et où des hommes et des femmes exercent des responsabilités. Ce modèle est plutôt signifiant pour les temps ecclésiaux où nous sommes.

Construire la communauté

     Les communautés pauliniennes ne sont pas homogènes. Elles comprennent des gens très divers par le statut social, l’éducation, le métier, l’origine ethnique; elle est ouverte aux hommes et aux femmes. Cette diversité est riche mais source de tensions. Paul a un profond souci de la communion entre toutes ces personnes. Mais sa vision de l’unité n’est pas fusionnelle : les différences sont constituantes de la communauté. L’image du Corps du Christ exprime bien cela. Faire communauté, pour Paul, c’est miser sur les relations. Nous en parlons davantage ces dernières années.

Médium et message

     Paul s’est adressé à des auditoires variés. Son moyen de communication privilégié est celui de la parole. C’est un art qui s’apprenait, la rhétorique; Paul en connaît les règles et les maîtrise bien. S’il voyait aujourd’hui toute la diversité de moyens existants, cela l’intéresserait et il s’y initierait sérieusement.

     Le message de Paul n’est pas d’abord centré sur la morale. L’essentiel pour lui, c’est Jésus Christ, sa personne, sa parole, sa croix et sa résurrection. Tout tourne autour de ce kérygme dont il déploie la richesse et la profondeur. Croire en Jésus Christ, et appartenir à son corps, est l’enjeu premier. Ce retournement demande de se détourner des idoles et de s’engager dans des relations de mutualité. Cette foi active par l’amour va requérir des changements de vie, des ruptures et des non-conformismes. Mais d’abord parce que le Christ a été découvert. De plus, Paul connaît les Écritures et s’y réfère fréquemment. Les grandes figures et événements de la première alliance sont repris à la lumière de la foi en Christ. La catéchèse actuelle peut y trouver des pistes.

Appel à l’expérience et au cheminement

     Quand Paul s’adresse aux chrétiens, il utilise une grande variété d’arguments pour répondre à leurs questions et les former à la vie chrétienne. Entre autres, il fait appel à leur expérience de conversion et à leur engagement pour le Christ. Il fait aussi appel à leur jugement, car il s’adresse à des adultes. Et ses interventions sont différenciées; tout n’est pas sur le même pied.

     Autre dimension interpellante : Paul invite à entrer dans un long cheminement croyant, impliquant une croissance dans tous les domaines. Que ce soit pour la foi, l’espérance et la charité, ou pour la connaissance, les sentiments et la pratique, Paul appelle à progresser, à grandir. Tout n’est pas acquis au point de départ qu’est le baptême.

L’universalité 

     Enfin, une actualité de Paul qui commence à être davantage reconnue est celle de son rôle dans l’émergence des droits de la personne. D’où nous vient cette vision de la dignité et l’égalité de chaque être humain, de façon universelle, pour toute culture, pour les hommes et les femmes, pour les gens de tout âge? Ces valeurs de respect et de solidarité ont leur fondement, historiquement, dans les perspectives radicales ouvertes par Jésus de Nazareth et développées par Paul de Tarse. Cela est notre héritage, extraordinaire. Nous pouvons en être fiers et le transmettre avec bienveillance et à-propos.

Daniel Cadrin

Source : bulletin Passages vol. 8 no 2 (2009) publié par l’Office de catéchèse du Québec.

 

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La lapidation dans la Bible