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Comprendre la Bible
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chronique du 15 juin 2007

 

Relations sexuelles avant le mariage

QuestionJ’aurais voulu avoir des renseignements pour savoir ce que dit la Bible par rapport à l’amour et au mariage. En particulier, est-il vrai que l’on ne doit pas faire l’amour avant le mariage? (David)
 

Réponse
Il y a deux questions ici qui ne sont pas nécessairement liées. D’abord le mariage. L’Ancien Testament en parle relativement peu comme tel parce qu’il s’agit d’une institution fondamentale de la société qui est si normale ou naturelle. Ainsi, chaque homme se marie à une ou plusieurs femmes, le célibat n’étant pas une option et étant mal vu. À un époque très ancienne, la polygamie s’expliquait par le fait que l’amour n’était pas nécessairement une composante du couple marié (ce qui ne veut certainement pas dire que les époux ne s’aiment pas). Il s’agissait surtout de fonder une famille. Il faut se souvenir qu’en moyenne les gens vivaient une trentaine d’année et que les femmes mouraient souvent en couche. Pour assurer sa postérité, il fallait donc penser à une « alternative » (Gn 1,28; 9,1; Ps 127,3-5; 128,2-3). C’est ainsi que les patriarches bibliques avaient plusieurs femmes sans que cela cause le moindre problème (cf. Gn 22,20-24; Dt 21,15). Le nombre d’épouses variait selon la richesse et le statut social. Le roi se devait d’avoir un harem parce qu’il était considéré comme celui qui apportait la vie à son peuple. Il était donc essentiel qu’il procrée de nombreux enfants. Quand le roi n’était plus en mesure de procréer (cf. David 1 R 1,1-11) il fallait qu’il laisse la place à son successeur. Cela dit, la plupart des hommes ne pouvaient se marier qu’à une seule femme.

     Le féminisme est une invention occidentale récente. Dans les société orientales anciennes, la femme n’avait pas de statut social; elle appartenait soit à son père soit à son mari ou, en cas de décès de l’un ou de l’autre, à son (ses) frère(s). Le fiancé devait en quelque sorte l’« acheter » à son père (la dot; Gn 29,15-30; Ex 22,16; 1 S 18,17-27) avant qu’elle lui soit « livrée » (Gn 20,3; 31,15; Dt 22,22). Mais il fallait protéger la femme des abus possibles. Donc, en cas de viol ou de relations hors mariage, il fallait l’épouser (Gn 34,4; 2 S 13); en cas de divorce il fallait lui remettre un document qui attestait qu’elle n’était ni une prostituée ni une femme en fuite, donc qu’elle pouvait légalement se remarier (Dt 24,1).

     Jusqu’ici, on a parlé du mariage dans son aspect social et juridique. Y a-t-il dans l’Ancien Testament une « théologie » du mariage? Les seuls livres qui proposent un certain enseignement sur le mariage est le début du livre de la Genèse, le livre de Tobit et le Cantique des cantiques. En Gn 2,18-24 le récit mythique présente l’humain (« Adam ») avant la division des sexes en affirmant qu’il n’est pas bon qu’il vive seul. Comme aucun animal n’est jugé capable de combler la solitude de l’humain, de sa substance, Dieu forme une femme. En la voyant, l’humain se reconnaît mâle et sent que la femme est comme une partie de lui; il affirme que désormais il ne sera complet que dans l’union avec sa « douce moitié ». Le livre deutérocanonique de Tobit est tardif (vers 200 avant J.-C.) et des passages comme Tb 7–10 peuvent proposer ce que nous appellerions une théologie du mariage. Il reste à dire un mot sur le Cantique des cantiques. Quant on lit ce petit livre littéralement, on constate qu’il chante l’amour entre un homme et une femme et qu’il est même très sensuel. La tradition a hésité entre deux lignes interprétatives. L’une admettrait que le livre a d’abord été écrit d’un couple humain puis réinterprété de l’amour de Dieu envers son peuple ou envers le croyant; l’autre (peut-être un peu pudibonde...) comprend uniquement le Cantique des cantiques de l’amour de Dieu avec son peuple (mais il lui faut alors expliquer les passage les plus explicites). La première interprétation est préférée aujourd’hui par les commentateurs. Du Cantique des cantiques il ressort que l’amour humain est beau et bon et qu’il a quelque chose à voir avec l’amour de Dieu. Quant à la sexualité, l’Ancien Testament l’encadre strictement, n’admettant comme relations normales que celle d’un homme avec une femme dans le mariage. Les prophètes, enfin, ont comparé à un mariage l’amour de Dieu pour son peuple (Is 50,1).

     Le Nouveau Testament reprend la question en y faisant intervenir l’enseignement de Jésus dans l’Évangile et la première réflexion chrétienne. Dans l’Évangile, Jésus enseigne fort peu sur le mariage, mais le passage de Mc 10,1-12 // Mt 19,1-9 est fort éloquent. Le mariage est indissoluble (sauf ce qui est dit en Mt 5, 32 et qui n’est pas clair). Saint Paul a repris la question dans 1 Co 7 et il compare à un mariage l’amour du Christ pour son Église (voir Éph 5).

     La morale sexuelle de l’Église est une autre question, une question de respect, d’attente mutuelle, qui dépasse le strict cadre biblique.

Hervé Tremblay

Chronique précédente :
La Bible des Gédéons