chronique du 17 septembre 1999 |
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Femmes et disciples« Pourquoi
Jésus n'a-t-il pas choisi des femmes comme disciples? »
(N. L.) À chaque fois que j'entends cette question, je sursaute. D'abord parce qu'on me la pose très souvent. Ensuite, parce que la personne qui me la pose prend pour acquis qu'aucune femme ne faisait partie du groupe des disciples de Jésus. L'étonnement passé, je réalise combien les mots peuvent nous tromper. Prenons le temps de clarifier. Des femmes parmi les disciples de Jésus?Parmi les disciples de Jésus, aurions-nous rencontré des femmes? Au moins deux expressions nous permettent de le croire. D'abord, les évangiles nous présentent des femmes qui « suivaient Jésus ». Cette première expression désigne, en effet, la suite d'un maître. Des personnes écoutent l'enseignement de Jésus, tentent de le mettre en pratique et le suivent (parfois à travers ses déplacements). Parmi ces groupes de disciples -- dont il est souvent question dans les évangiles -- n'y aurait-il eu que des hommes? Plus explicitement, il est question d'un groupe de femmes qui le suivaient, depuis les débuts de sa vie publique jusqu'à la croix : « Tous ses familiers se tenaient à distance, ainsi que les femmes qui le suivaient depuis la Galilée et qui regardaient. » (Lc 23,49 et parrallèles). Nous apprenons, par ailleurs, que des femmes de l'entourage de Jésus l'assistaient financièrement (Lc 8,1-3). Voyons maintenant l'expression: « être assis aux pieds » de quelqu'un. Elle évoque la position du disciple. Paul y recourt dans les Actes des apôtres: « Je suis Juif, né à Tarse en Cilicie, mais c'est ici, dans cette ville, que j'ai été élevé et que j'ai reçu aux pieds de Gamaliel une formation strictement conforme à la Loi de nos pères. » (Ac 22,3). Ailleurs dans l'évangile, des disciples anonymes sont « assis autour de Jésus » (Mc 3,32.34) ou « à ses pieds » (Lc 8,35). Mais voici que Marie, la soeur de Marthe, « s'étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole » (Lc 10,39)! Voilà bien la position d'une authentique disciple de Jésus! D'ailleurs, cela constitue, à n'en pas douter, la « meilleure part » qui « ne lui sera pas enlevée » (Lc 10,42). À la lumière de ces extraits, nous pouvons donc affirmer qu'il y avait des femmes parmi les disciples de Jésus. À cette époque, ce n'était pas pratique courante. Mais peut-être n'est-ce pas tout. Des femmes parmi les « apôtres »?Beaucoup s'étonneront que la question soit même posée. « N'y a-t-il pas seulement douze apôtres? Ne connaissons-nous pas leurs noms? » Dans le Nouveau Testament, le terme « apôtres » n'est pas réservé aux Douze. De fait, seul l'évangéliste Luc l'applique presque exclusivement à ce groupe. Paul, par ailleurs, se présente lui-même comme apôtre : « Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par un homme, mais par Jésus Christ et Dieu le Père qui l'a ressuscité d'entre les morts... » (Gal 1,1, etc.). Bien qu'il se dise « le plus petit des apôtres » (1 Co 15,9) ou « l'apôtre des païens » (Rm 11,13), il n'en défend pas moins la légitimité de ce titre (1 Co 9,1). D'ailleurs, il l'attribue aussi à ses compagnons de mission (1 Th 2,7) ou même à certains adversaires qu'il traite de « faux apôtres » ou, avec ironie, de « superapôtres » (2 Co 11,13.15). Sous le terme « apôtres » Paul inclut d'autres groupes que celui des Douze. De même, dans l'évangile de Luc, nous trouvons un groupe élargi d'« envoyés » ou d'apôtres. Au chapitre 10, en effet, voici que Jésus choisit soixante-douze autres disciples et les « envoya deux par deux en avant de lui » (versets 1 et 17). Si on ne trouve aucune femme dans le groupe des Douze, peut-on en dire autant du groupe des « envoyés » ou « apôtres » au sens large? En résumé, dans le Nouveau Testament, les termes « envoyé » et « apôtre » s'appliquent à d'autres groupes qu'aux Douze. Ils désignent alors les personne envoyées pour annoncer le message évangélique. Voici maintenant que l'épître aux Romains présente une femme, Junias, comme « apôtre » au même titre que son mari (Rm 16,7). Ailleurs, on apprend que des épouses « d'apôtres » participent aux voyages missionnaires (1 Co 9,5). Quelle est la nature exacte de cet « envoi »? Difficile à dire. Mais il semble que certaines femmes aient été intimement liées à l'annonce de la Bonne Nouvelle. Est-il si improbable que d'autres (comme la Samaritaine) se soient mises à courir et à dire aux gens : « Ne serait-il pas le Christ? » (Jn 4,29). Ainsi, dans le Nouveau Testament, il est même possible qu'on trouve des traces de femmes envoyées ou « apôtres », au sens large du terme. Article précédent
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