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Archéologie
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chronique du 18 décembre 2017

 

L’église de la Nativité à Bethléem

Intérieur de l'église de la Nativité

Intérieur de l'église (photo : Wikipedia)

L’église de la Nativité est véritablement le point central de la ville de Bethléem. Cet édifice remarquable est le seul qui nous soit parvenu presque intact de la période byzantine. Elle est construite sur une région où abondent les grottes. Pas étonnant que des traditions anciennes comme le Protévangile de Jacques aient présenté la naissance de Jésus dans une grotte. Certaines grottes sous la basilique ont servi de tombes pour des personnes comme saint Jérôme, Paule et Eutochia.

Reconstitution de l’église de Constantin

Reconstitution de l’église de Constantin. (photo : Wikipédia)

L’église de Constantin

Après avoir démantelé les constructions associées au culte de Tammuz/Adonis, les constructeurs de Constantin se sont employés à ériger une église digne du culte rendu au Sauveur. L’église constantinienne était composée de deux parties distinctes. La nef carrée (26,5 m par côté) était divisée par quatre rangées de neuf colonnes. On divisait ainsi l’allée centrale, de 9 m de largeur, des allées latérales (allées intérieures = 3 m; allées extérieures = 3,5 m). Le plancher de l’église était couvert de mosaïques dont on peut voir encore quelques bons fragments sous les trappes aménagées dans l’église.

Plan de l'église de la Nativité

Plan de l’église de Constantin en noir plein et de l’église actuelle. (photo : Wikipédia)

À l’est de la nef se trouvait le chœur, un octogone dont chaque côté faisait près de 8 m. Cet octogone se trouve juste au-dessus de la grotte. Depuis la nef, on pouvait monter dans ce chœur en empruntant l’un des trois escaliers. Par les escaliers latéraux, on passait d’abord devant de petites pièces qui ont pu servir de sacristies (diaconicon et prothesis). On a trouvé des mosaïques dans la pièce nord. Une croix y était représentée, ce qui signifie que la mosaïque a dû être faite avant 427. En effet, en 427 un décret impérial a interdit de représenter les croix sur les mosaïques des planchers des églises. Un deuxième octogone occupait le centre du premier et devait recevoir l’autel. Son plancher était aussi décoré de mosaïques. Deux escaliers étroits, aménagés au nord-ouest et au sud-est de ce petit octogone, permettaient d’accéder à la grotte sous l’octogone.

Cette construction constantinienne, l’une des plus anciennes en Palestine, se situe donc sur un endroit vénéré depuis les premiers siècles. Est-ce l’endroit exact de la naissance de Jésus? Pour répondre à cette question, il faudrait d’abord faire un peu d’exégèse des textes bibliques, ce qui n’est pas notre propos ici. Il n’en demeure pas moins que très tôt dans la tradition de l’Église, cet emplacement a été vénéré et l’on y remémore le souvenir de cette naissance.

Mosaïques sous le plancher

Mosaïques du sol du IVe siècle (photo : Sébastien Doane)

Imaginez maintenant toute une église ainsi décorée de ces mosaïques. On a retrouvé aussi des motifs floraux et animaux, ces derniers ayant été mutilés. Des fouilles approfondies de l’église ont permis de démontrer que les mosaïques n’avaient pas été installées en même temps que l’on a construit l’église constantinienne du 4e siècle. En fait, les mosaïques ne se trouveraient pas tout à fait au même niveau que la base des colonnes constantiniennes. Il se peut donc qu’une réfection de la première église ait offert l’opportunité d’ajouter des mosaïques aux planchers des allées centrales et latérales, peut-être au 5e siècle. On peut quand même toujours parler du plancher de l’église constantinienne.

À l’époque de Justinien

À l’époque de Justinien (après 529) on entreprit de construire une nouvelle église, car l’ancienne ne suffisait plus aux besoins des nombreux pèlerins venus prier à la grotte de la Nativité. Justinien ne détruisit pas l’église constantinienne, mais utilisa plutôt une bonne partie de ses structures, en modifiant surtout le chœur qui compterait désormais trois absides. Les murs de la nef restèrent cependant les mêmes avec, cependant, une rallonge vers l’ouest d’environ 6 m. On aménagea également de nouveaux accès à la grotte en construisant deux nouveaux escaliers semi-circulaires, l’un au nord l’autre au sud. Ce sont encore ces escaliers que l’on emprunte aujourd’hui pour accéder à la grotte. On peut dire que, pour l’essentiel, l’église de la Nativité d’aujourd’hui est celle de Justinien. C’est aussi dans cette église justinienne, dans le transept sud du chœur que les musulmans pouvaient faire leurs dévotions depuis l’époque d’Omar. C’est pour cette raison que la décoration de cette portion de l’église s’apparente davantage à ce que l’on trouve dans une mosquée.

Les Croisés ont conservé l’église justinienne, mais ont beaucoup contribué à sa décoration intérieure. Normal après quelques siècles de relative négligence. Et comme on voulait en faire un archidiocèse, il fallait redonner à cette église le lustre qu’elle avait perdu. On entreprit d’y ajouter des peintures, des marbres et des mosaïques. Des scènes des évangiles (dans le chœur) côtoyaient les représentations de sept conciles œcuméniques (mûr côté sud de la nef) et de six conciles régionaux (mûr côté nord de la nef), ainsi que d’autres peintures associées à la vie de Jésus. Entre les fenêtres supérieures, des anges gardaient les fidèles et, sur les colonnes, on avait dessiné des saints.

Mosaïque murale des 7e-8e siècle

Mosaïque murale byzantine des VIIe – XIIe siècles (photo : Wikipédia)

Des croisés à aujourd’hui

Il reste peu de chose de ces décorations des Croisés aujourd’hui, car les incendies et les tremblements de terre ont eu raison d’une bonne partie de ces œuvres, sans compter les rivalités internes entre les dénominations religieuses qui ont contribué à ce que l’on néglige d’entretenir correctement les lieux, et les actes de vandalisme perpétrés par des bandits. Les besoins en marbre à Jérusalem emmenèrent aussi les musulmans à venir se servir dans l’église de Bethléem, laissant cette dernière sur ses seules charpentes de bois. On ne retrouve plus aujourd’hui la magnifique église qui devait briller de mille feux jusqu’au 12e siècle. 

La suie et la crasse ont remplacé les mosaïques et les peintures. Mais, visiter cette église reste un moment particulier, car on sent que l’on entre dans le lieu même qui a vu passer ici près de 1600 ans d’histoire. Et il n’en reste pas seulement des ruines, comme c’est souvent le cas avec les autres églises en Israël et en Palestine. Celle-ci a de l’histoire et nous accueille, dans son histoire.

Robert David

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Bienvenue à Bethléem

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Tibériade et ses richesses

 

 

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