chronique du 12 décembre 2008
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Tombe de dame Marie au CédronEntrée de la tombe de Marie au Cédron. Les chrétiens vénèrent trois tombes de Marie! Pour les uns, Marie aurait suivi saint Jean à Éphèse et y aurait été ensevelie. Pour d’autres, les plus nombreux, c’est à Jérusalem qu’elle termina son séjour terrestre : quelques-uns voudraient qu’elle ne soit pas morte, mais qu’elle se soit tout simplement endormie, au mont Sion, où une église commémore l’événement sous le vocable de « Dormition de Marie ». Cette tradition tardive n’a pas réussi à supprimer cette autre tradition plus ancienne qui veut qu’elle soit bien morte, comme Jésus, son fils, et que les chrétiens l’aient ensevelie dans la vallée du Cédron. On connaît bien une église de la « Tombe de Marie », près de Gethsémani, confiée à la garde des grecs et des arméniens, qui est bien marquée par l’architecture du temps des Croisés des XIIe et XIIIe siècles! En février 1972, une inondation subite submergea totalement l’église, causant de lourds dommages. Au moment de la restaurer, on demanda à deux archéologues franciscains, bien connus pour leurs travaux de l’époque byzantine, de procéder à l’examen archéologique des lieux. Les résultats n’ont pas manqué de provoquer plusieurs surprises! Un récit bien connu surtout dans sa version latine sous le titre de Transitus Mariæ (« Passage ou mort de Marie »), que les historiens datent des IVe et Ve siècles, mentionne une tombe de Marie dans le Cédron; les versions grecque, syriaque et éthiopienne précisent que c’est à Gethsémani qu’elle se trouve, et qu’elle consiste en une chambrette creusée dans le roc, dont la paroi orientale est munie d’une banquette sur laquelle le corps de la Vierge fut déposé. Il s’agit de toute évidence d’une salle sépulcrale à arcosolium, soit une tablette surmontée d’une arche, comme nous en connaissons des centaines, en Palestine, depuis le Ier siècle. Juvénal, évêque de Jérusalem, raconte au concile de Chalcédoine, en 451, que c’est bien à Gethsémani que son tombeau fut trouvé vide, trois jours plus tard, quand on voulut la montrer à Thomas, et que l’empereur Théodose (379-395) y a fait bâtir une église, autour de la chambrette à « banquette » qu’on isola du reste du rocher. Les pèlerins, par la suite, mentionnent presque tous l’existence d’un tel lieu qu’ils vénèrent. Le même Juvénal réaménagea les lieux à son retour du concile. Un siècle plus tard, l’empereur Maurice (589-602) fît construire une autre église au-dessus de la première, de forme octogonale, selon la tradition byzantine pour tout monument à la mémoire d’un personnage célèbre. Ces églises ont été très endommagées par les perses en 614 et Saladdin en 1187. Ce que nous pouvons voir aujourd’hui n’est qu’une façade bâtie par les Croisés devant l’escalier monumental qui descendait à l’église inférieure, sorte de crypte creusée dans le roc au temps de Théodose. L’inondation de 1972 nous a permis d’étudier avec précision la nature de ces travaux de la fin du IVe siècle. PLAN 1 Un premier résultat de cette étude concerne la nature du lieu lui-même : nous sommes vraiment dans une région de tombes, depuis le Ier siècle de notre ère, comme les ouvrages en F (voir le plan 1) nous le montrent clairement. Les ouvriers de Théodose ont donc taillé dans le roc déjà aménagé en lieu de sépulture une église souterraine en forme de croix. Une anomalie apparente s’explique aussitôt : à quoi servait donc cette sorte de couloir en M, dont le sol est plus élevé que celui de l’église et accuse une perte? Les fouilles ont révélé que nous avons là une entrée du cimetière, dans le style bien connu dans d’autres tombes de la vallée du Cédron. Comme l’entrée de l’église était du côté opposé, on en bloque donc le passage. Voilà un autre indice que nous sommes bien dans une région de tombes anciennes. PLAN 2 Dans le bras long de la croix (B du plan 1), on isola un bloc de rocher (A du plan 1 et plan 2) qui atteint les 2 m de hauteur. Le rocher, au fond de l’abside, s’élève même jusqu’à 6,50 m! Ce bloc avait été totalement recouvert de plâtre, et à l’intérieur, une sorte de coffre de marbre servant d’autel était censé renfermer la tombe de Marie. Pour la première fois, nous avons pu observer qu’il s’agit bien d’un bloc de rocher qui avait été aménagé en chambrette. En enlevant les dalles de marbre, on y découvrit les restes d’une tablette creusée dans la paroi (voir le plan 3), fort endommagée par les pèlerins qui se taillaient des morceaux de ce lit funéraire. On sait qu’au Moyen-Âge des reliques de la tombe de Marie, à Jérusalem, circulaient parmi les communautés chrétiennes d’Europe! C’est peut-être pour cette raison qu’on recouvrit de plâtre les parois du rocher et qu’on enferma ce qui restait de la tablette funéraire dans un coffre de marbre! Le monument fut ensuite orné d’une colonnade sur ses quatre côtés et surmonté d’une petite coupole. PLAN 3 L’archéologie vient donc confirmer une tradition ancienne sur le lieu de sépulture de Marie. Les architectes ont suivi, ici, les techniques des bâtisseurs de Constantin au Saint-Sépulcre, dans la ville de Jérusalem. Depuis la fin du IVe siècle donc, les chrétiens ont toujours célébré le souvenir de la mort de Marie. Si Théodose fait faire ici de si gros ouvrages, c’est que la tradition y avait fixé de façon ferme ce souvenir. Jusqu’où pouvons-nous remonter pour retracer les origines de cette tradition? Nous devons être prudent pour le moment : tout ce que nous savons c’est que les sources littéraires parlent d’un tel lieu au cours du IVe siècle, peut-être même dès le IIIe siècle, et que l’archéologie nous révèle que ce secteur de la vallée du Cédron est bel et bien occupé par des tombes depuis le Ier siècle de notre ère. Plans tirés de B. Bagatti, M. Piccirillo and A. Prodomo, New Discoveries at the Tomb of Virgin Mary in Gethsemani, Jerusalem, Franciscan Printing Press (Studium Biblicum Franciscanum : Collectio minor 17), 1975, 95 p. Source : Parabole x/3 (1987). Article précédent :
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