chronique du 17 juin 2005
|
|||||
Une église
domestique? Une découverte archéologique très
récente nous renvoie à la première génération
de chrétiens, en Galilée. L'intérêt suscité
touchera certainement tous les lecteurs du Nouveau Testament. Ruines d'une maison à
Bethsaïde Depuis quelques années, on fouille la petite ville de Bethsaïde, située à deux kilomètres de la rive nord du lac de Tibériade, bien assise sur un promontoire avantageux. Le Jourdain coule à ses pieds, du côté est. Nous savons que trois des apôtres de Jésus étaient originaires de Bethsaïde : Pierre et André, deux frères, et Philippe (Jean 1,43-44; 12,20-22). On pense que les fils de Zébédée, Jacques et Jean, étaient aussi originaires de cette même ville. C'est près de Bethsaïde que Jésus multiplia les pains (Luc 9,10). On n'est pas surpris alors de voir Philippe et André bien actifs lors de cette scène (Jean 6,1-15). La grande maison à cour Dans la partie nord de la ville, on a dégagé une grande maison d'un style bien connu (« maison à cour »). Elle forme un grand rectangle de 18 mètres et 16,2 mètres de côté (fig. 1). L'entrée est située au sud (a), donnant immédiatement sur une grande cour à ciel ouvert, mesurant 10,9 x 11,5 mètres (b). Une telle grandeur de la cour est normale dans un pays qui permet la vie à l'extérieur pour la majeure partie de l'année. Tout de suite à droite, on voit une pièce fermée assez étroite (9,9 x 4,49 mètres), qui devait servir de cuisine; on y a trouvé jarres, marmites, fours et autres instruments propres à cette activité (c). Dans le coin formé par le mur de la cour et la cuisine, au sous-sol, on a retrouvé une grande cave à vin, vue les grandes urnes de céramique qui étaient encore appuyées contre les murs (d). C'est au nord de la cour que les pièces à habitation avaient été aménagées, formant un quadrilatère dont les dimensions ne sont pas totalement connues; cette partie de la maison a été très endommagée. On y reconnaît assez facilement une grande salle de séjour, servant aussi de salle à manger, à cause du mobilier (e). Elle donnait sur des pièces plus petites, aux dimensions incertaines. L'époque de la dernière occupation de cette maison doit être datée de la deuxième moitié de notre ère, car elle fut détruite vers 70, lors de la guerre des Romains contre les Juifs. Le fragment de jarre marqué d'une croix La découverte étonnante de cette fouille fut un gros fragment de jarre sur le sol de l'entrée de la salle de séjour (fig. 2). On y a gravé, avec un instrument pointu, une croix presque complète. Dans son état actuel, elle mesure 10,7 par 10,6 centimètres. On remarque aussitôt qu'à la croisée de ses bras on y a gravé un grand cercle. On a pensé sans trop d'hésitation qu'il s'agit bien de la croix des chrétiens. Au Proche-Orient ancien, on connaît ce signe de la croix qui n'est rien d'autre que la lettre t de l'alphabet; mais jamais un cercle n'est tracé à la croisée des barres. Très tôt, la croix est devenu un symbole important pour les chrétiens si nous nous référons à Paul : « Alors que les Juifs demandent des signes... nous proclamons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens... » (1 Co 1,22-23). Pourquoi croyons-nous que cette grande maison pourrait être une église domestique? C'est que l'histoire même des premiers chrétiens nous y invite fortement. Dans les Actes des Apôtres, nous lisons ces deux témoignages : « Jour après jour... ils fréquentaient le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons... (2,46); et chaque jour, au Temple et dans les maisons, ils ne cessaient d'enseigner et d'annoncer la Bonne Nouvelle du Christ Jésus (5,42) » : de toute évidence, on célèbre l'Eucharistie et on loue le Seigneur Jésus dans ces lieux domestiques. Saint Paul introduira les mêmes pratiques dans les communautés chrétiennes qu'il fonde en dehors de la Palestine (voir 1 Co 16,19; Philémon 2). Cette tradition de la maison comme lieu liturgique s'est maintenue au moins jusqu'à la moitié du IVe siècle. Constantin sera le premier à faire construire un bâtiment directement destiné au culte chrétien, qu'il appelle basilique, une « grande Salle royale ». C'est ainsi que la Sainte-Anastasie (« résurrection » ou le Saint-Sépulcre fut érigée à Jérusalem, et qu'une autre fut construite à Bethléem, au lieu de la nativité de Jésus. Dans la suite de l'histoire chrétienne, on délaisse progressivement la maison familiale comme lieu de culte pour se rassembler dans des églises bâties à cette fin. Si l'église domestique ne nous était connue que par Paul et Luc (Actes), nous venons peut-être d'en découvrir un premier témoin archéologique. Et quelle surprise qu'il soit de l'époque de ces deux témoins littéraires! Guy Couturier, CSC Samson et Dalila
|
|||||
| Accueil | DÉCOUVERTE (index) | Archéologie (index) | Vous avez des questions? | www.interbible.org
|
|||||