(photo : ACRB)
L’importance du geste en récitatif biblique
Hélène Pinard et Hélène Boudreau | 31 décembre 2018
Un Récitatif biblique est un passage intégral de la Bible qu’on inscrit dans le cœur par le balancement, la mélodie et le geste [1]. Lorsqu’on crée un récitatif biblique, les mots de la traduction sont choisis dans le but de se rapprocher le plus possible du sens du texte d’origine, tout en restant compréhensible en français. La mélodie contribue à suggérer le sens à donner au texte en faisant des appuis, des pauses, des reprises… Le choix des gestes permet de découvrir des nuances de significations, afin que l’ensemble mot/geste/mélodie véhicule toute la densité de sens possibles du texte.
Dans la vie de tous les jours, il est assez naturel d’accompagner nos paroles par des gestes. Ces gestes ont parfois un sens précis et facilitent la compréhension de notre message par nos interlocuteurs. Par exemple, une salutation verbale a de fortes chances d’être accompagnée d’un geste de la main.
Dans la discipline du Récitatif biblique, le choix des gestes relève d’une étude approfondie du vocabulaire biblique. Ces gestes permettent de compléter, d’enrichir et d’approfondir le sens objectif des mots tels qu’utilisés dans la culture de l’époque, sens parfois différent de celui qu’on lui donne aujourd’hui. Ainsi, le mot gloire [2] sous-tend non seulement une renommée extérieure répandue, sens encore actuel, mais fait également référence au poids c’est-à-dire à toute l’importance que Dieu prend dans nos vies. Le geste permet de ressentir qu’on est rempli de cette Présence, et qu’elle a du poids dans notre vie.
Les gestes contribuent à imprimer le texte en nous. Parfois, en faisant un arrêt sur geste, on découvre un sens « pour soi » de telle ou telle Parole, un sens subjectif. À ce moment-là, le geste relie la personne à son vécu, ouvrant un espace intérieur au travail de la Parole.
Voici un exemple à partir du texte que nous entendrons dans les célébrations de Noël (Lc 2,1-14). Des bergers, des pauvres en Israël, sont dans la nuit, gardant leur troupeau(Lc 2,8). De par leur métier, ils ne peuvent pas respecter les exigences de la Loi. C’est dans ce contexte de souffrances et d’attente qu’une lumière les enveloppe, les surprend (Lc 2,9). Et l’ange, le messager de Dieu, leur annonce qu’un Sauveur est né pour eux et il leur donne un signe : « Vous trouverez un enfant dans des langes et couché dans une mangeoire » [3] (Lc 2,11-12). Le signe offert aux bergers semble banal… jusqu’à ce que survienne un détail : la mangeoire.
Tout d’abord, une mangeoire est un endroit inusité pour coucher un nouveau-né. Le geste du récitatif suggère que l’enfant est à nos pieds, dans la mangeoire. Ainsi, il propose que, pour recevoir vraiment le Sauveur qui vient de naître, nul n’est besoin de courir au loin, de chercher au-delà des mers ou au plus profond des abîmes. Il est simplement nécessaire de se faire attentif à ce qui survient dans notre quotidien, dans notre vie de tous les jours. Car le Sauveur vient nous rejoindre là où nous avons besoin de salut, là où nous avons besoin d’être nourri.
Ceci nous amène à l’aspect « nourriture » que ce mot suggère. Le bébé qui est couché dans la mangeoire préfigure le Christ qui s’offre en « nourriture » pour toute l’humanité (Lc 22,14-20). Il y a des parallèles intéressants à faire entre les deux péricopes.
Souvent, les gestes permettent de faire des liens avec d’autres textes bibliques. La Parole imprimée en nous fait appel à la mémoire corporelle et des liens surprenants se présentent, enrichissant notre expérience spirituelle. En s’arrêtant au geste de l’enfant dans les langes, cet enfant présenté comme Sauveur, Messie et Seigneur (Lc 2,11), un lien peut être fait avec le Psaume 8,3. L’un des gestes rappelle celui de l’enfant dans les langes. Le verset 3 du psaume 8 évoque la louange de l’action de Dieu qui monte de la bouche d’enfants et de nourrissons, érigeant ainsi un rempart face aux ennemis et faisant taire leur soif de vengeance [4]. L’apparente fragilité d’un enfant est parfois plus puissante que ce qu’on pense.
Ainsi, l’étude approfondie du vocabulaire biblique, le sens subjectif qui émerge au fil des répétitions et les liens possibles avec d’autres textes justifient la précision gestuelle nécessaire en Récitatif biblique. Pour notre usage personnel ou pour approfondir un aspect particulier, on peut, le temps nécessaire, modifier un geste établi. Cependant, la transmission des récitatifs se fait dans le respect du geste qui exprime le mieux le sens objectif du mot. Des vidéos, avec droits d’auteur [5], sont disponibles suite aux sessions pour favoriser la consolidation de l’apprentissage par la mélodie, les mots et les gestes.
Hélène Pinard et Hélène Boudreau sont transmetteures pour l’Association canadienne du récitatif biblique.
[1] Louise Bisson, « Information » Qu’est-ce que le récitatif biblique? www.recitatifbiblique.com 2 octobre 2005.
[2] Kabod (en hébreu).
[3] Traduction Marcel Jousse.
[4] Voir Robert Michaud, Les psaumes, Montréal, Paulines, 1993, p. 74. Le psaume 8 sera enseigné les 15 février (19h à 21h) et 16 février (9h à 16h) à Sainte-Thérèse. Contact : Hélène Boudreau, ([email protected]). Consulter de site de l’ACRB, http://www.interbible.org/acrb/
[5]
Les vidéos se veulent un support de révision et non un moyen d’apprentissage individuel. (Consulter le site de Mme Louise Bisson, www.recitatifbiblique.com.)