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chronique du 27 février 2015

 

« Parle Seigneur, ton serviteur écoute. » 2/3

Eli et Samuel (détails)
John Singleton Copley, 1780
Huile sur toile, 152 x 197 cm
Wadsworth Atheneum, Hartford, Connecticut, USA

Il est intéressant de s’arrêter sur les deux situations familiales sous-jacentes à ce récit du Premier livre de Samuel. La mère de Samuel est au temple et sa présence irrite Éli qui la croit saoule, mais de fait elle pleure de douleur à cause de sa stérilité. Pleine d’amertume, elle adresse une prière au Seigneur en pleurant à chaudes larmes signifiant son désir d’avoir un garçon lui faisant la promesse de le lui consacrer s’il daigne exaucer sa prière.

     Cette stérilité n’est pas du tout étrangère à la situation de couples dont plusieurs vont référer aux techniques actuelles, à l’adoption internationale pour espérer voir leur désir d’avoir un enfant s’accomplir. Quelques-uns comme Anne, comptent sur l’action de Dieu et demandent  que cette grâce leur soit accordée.

     Anne priait avec insistance et prolongeait sa prière devant le Seigneur, et Éli remarquait sa bouche qui remuait sans qu’aucune voix soit audible. Se méprenant sur son état, il lui dit : « Seras-tu longtemps ivre? Va cuver ton vin. » Elle lui partage sa douleur en s’ouvrant à lui. Après l’avoir accueillie, il l’envoie en disant : « Va en paix, et que le Dieu d’Israël t’accorde ce que tu lui as demandé. »

     Anne n’est plus seule dans sa présence à Dieu et la bénédiction d’Éli transforme sa situation; elle mange et n’a plus le même visage. On pourrait souhaiter que plusieurs de nos contemporains puissent entrer dans une telle expérience, dans une semblable alliance pour ne pas demeurer seuls dans l’amertume, dans la peine, la désespérance, et que leurs cœurs tournent à la confiance qui en soi est déjà une ouverture à la fécondité.

     Dans la situation d’Anne, elle reconnaît que sa chair est indisposée à l’engendrement et elle reconnaît que le fruit inattendu de Samuel appartient au Seigneur qui l’a visitée à travers son époux et s’est souvenu d’elle. Son mari adopte la même attitude lorsqu’elle décline d’aller acquitter le sacrifice annuel de se rendre au Temple pour accomplir son vœu. Elle propose plutôt d’attendre que l’enfant soit sevré pour qu’ils aillent alors à Silo pour qu’à ce moment-là elle le cède au Seigneur pour toute sa vie. Et son époux acquiesça.

     On assiste à une grande dépossession du couple par rapport à une vie issue de leur intimité conjugale visitée par la grâce de Dieu. Ils sont loin « d’un enfant pour nous ». Ils acceptent cette désappropriation comme l’avait promis Anne au moment de sa prière. Elle se souvient comme Dieu s’est souvenu. Et de son cœur va jaillir une action de grâce, une reconnaissance infinie, un chant, le cantique d’Anne qui inspirera le cantique de Marie mieux connu sous le nom de Magnificat.

     La fécondité de la stérile et sa joie habiteront le cœur d’un peuple et celui d’une autre femme vierge à des siècles de distance et l’inspirera pour rendre grâce à l’impossible de Dieu qui se manifeste une fois de plus dans la chair de l’humanité.

Pierre Desroches

Suite de l'article :
Abus des fils du prêtre Éli (1 S 2,12ss ) 3/3

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Gabrielle Baron (1895-1986)