Miniature illustrant le v. 13 du Psaume. Psautier de Stuttgart, folio 23. Bibliothèque d’État du Wurtemberg, Stuttgart (Wikipedia).
Le Psaume 91 (90) : avec Dieu, rien à craindre!
Jean Grou | 31 janvier 2022
Lire le psaume (version liturgique)
Rien d’étonnant à ce que le Psaume 91 figure dans la liturgie du premier dimanche du Carême (année C). Les thèmes qu’il aborde nous situent en plein dans l’esprit de ce temps de l’année. De plus, deux de ses versets (v. 11-12) sont cités par le diable dans le récit de la tentation de Jésus dans le désert, qui constitue la lecture évangélique du premier dimanche du Carême.
Les changements d’interlocuteurs permettent de supposer ce qui serait à l’origine de ce psaume. Il pourrait en effet s’agir de la démarche d’une personne (peut-être un roi) qui se rend au temple pour chercher à obtenir le soutien du Seigneur alors qu’elle s’apprête à traverser une épreuve. Les versets 1 et 2 rapportent les mots qu’elle prononce en se présentant au sanctuaire. Puis les versets 3 à 13 exposent la réponse que lui donnent les prêtres. Enfin, point culminant, Dieu lui-même prend la parole, aux versets 14 à 16, et apporte la conclusion à la prière. Revoyons le tout plus en détail.
Au départ, donc, une personne se présente au temple et expose son cas. Avec des mots comme « abri », « ombre », « refuge » et « rempart », on comprend qu’elle a besoin de protection. Pour obtenir celle-ci, elle ne cherche pas à gauche et à droite : elle se tourne vers le seul à qui elle sait pouvoir faire confiance. Avec une certaine insistance, elle l’interpelle en lui donnant quatre noms différents : Très-Haut, Puissant, Seigneur et Dieu (selon la traduction de la Bible de la liturgie).
Vient ensuite la réponse des prêtres qui s’étend sur dix versets. Ils exposent abondamment tout ce que la personne devant eux est en droit d’attendre du Seigneur. Ce dernier, en effet, la protégera des pièges des ennemis, de la maladie, des assauts d’une armée et des morsures d’animaux venimeux, rien de moins! Dieu mettra même à contribution ses anges, ce que le diable rappellera à Jésus en le mettant à l’épreuve (voir Luc 4,10-11). Les propos de cette dizaine de versets véhiculent une idée répandue dans la tradition de la sagesse israélite selon laquelle le Seigneur veille sur les justes et prend leur défense dans l’adversité. Une conception qui sera cependant remise en question notamment par le livre de Job, qui fait preuve d’une grande lucidité. Dans la vie de tous les jours, en effet, même les personnes les plus vertueuses et irréprochables peuvent être victimes de grands malheurs.
Le Psaume 91 ne va cependant pas dans cette direction comme l’illustrent les trois versets qui exposent la réponse de Dieu. Celui-ci confirme solennellement son engagement à défendre la personne qui fait appel à lui. Il va jusqu’à lui promettre de « le glorifier ». Le Seigneur est ici confirmé dans son rôle de protecteur du juste ; jamais sa fidélité ne décevra.
L’Église a fait du Psaume 91 la prière du soir par excellence, l’intégrant à l’office de complies, célébré juste avant le coucher. Après une journée éprouvante, n’est-il pas réconfortant, en effet, de se rappeler que le Seigneur veille sur les siens en toutes circonstances? Certes, il y a bien des moments où on peut avoir l’impression qu’il demeure les bras croisés, indifférent aux malheurs qui s’abattent sur le monde. Mais ce n’est pas ce qu’on a besoin d’entendre avant d’aller au lit! Mieux vaut au contraire garder allumée la petite flamme de l’espérance qui aidera à traverser les ténèbres de la nuit.
Jean Grou est bibliste et rédacteur en chef de Vie liturgique et Prions en Église.