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chronique du 1er avril 2008
 

Ici on n'efface jamais


Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? ... Sois le pasteur de mes brebis (Jean 21, 16).

Cette petite fille était vraiment très ennuyée : je n'avais pas de gomme à mettre à sa disposition. Or la trace sur le papier n'était jamais ce qu'elle voulait : « C'est pas bien », « c'est pas comme je voulais ». J'ai dit : « Ici, tu vois (ici, c'est-à-dire dans mon bureau de psychanalyste, dans le lieu de la thérapie), ici on n'efface jamais. On arrange, on change, on transforme - mais on n'efface pas. On se sert de ce qu'on a fait. »

 Plus tard j'ai aussi expliqué que c'était l'intérêt de l'usage direct du feutre, puisqu'on sait qu'on n'effacera pas. Et peu à peu elle a compris qu'en effet ici on n'efface pas le passé. On cherche plutôt à le conserver, à le reconnaître, à l'utiliser.

  « Qu'est-ce qui ne va pas pour ton cheval ? Qu'est-ce que tu aurais voulu effacer pour le faire autrement ?

  - C'est sa patte. Elle n'est pas comme il faut.

  - Il aurait voulu avoir une patte comment ? »

  Finalement elle imagine comment elle aurait voulu le faire, ce cheval... Et nous sommes devant l'image du cheval ancien « pas comme il faut », et celle, mentale, du cheval comme i1 faut, réparé en somme. Naît l'histoire d'un petit cheval qui avait eu des ennuis mais qui maintenant court dans la prairie. On pourra parler de ces parts d'elle-même, de ces morceaux de sa vie dont rien jamais ne pourra faire qu'ils aient été autres, mais avec lesquels on peut apprendre à vivre. Si le passé ne saurait être modifié, le regard sur le passé, lui, peut changer. L'avenir peut se construire sans que s'efface le passé (Nicole Fabre, dans Le sacrement du pardon entre hier et demain, Desclée, 1993).

LIEN : Pierre ne pourra jamais faire comme s'il n'avait pas renié Jésus ; les disciples ne pourront jamais vivre comme s'ils n'avaient pas fui pendant l'arrestation et la passion de Jésus. On n'efface jamais le passé. Mais l'avenir peut se construire sans que s'efface le passé. Et c'est précisément ce qui arrive en ce beau matin, sur le lac et sur la rive où se trouve Quelqu'un qui connaît tout et qui ouvre l'avenir. « Jetez le filet à droite de la barque, et vous trouverez. » Cessez de ruminer le passé. On fait du nouveau. « Venez déjeuner.» Chacun est accueilli dans la communion de ce brunch improvisé où, de nouveau, tout est partagé. « Pierre, m'aimes-tu?... Sois le pasteur de mes brebis.» À travers Jésus coule une source infinie d'amour qui touche d'abord Pierre et les disciples et qui veut se répandre grâce à toutes les personnes qui sont appelées à accueillir et à répandre la Bonne Nouvelle...

 

Chronique précédente :
Le reflet de Dieu