La prière
du pauvre
Qui s'élève sera abaissé; qui s'abaisse
sera élevé (Luc 18, 14).
L'autre jour, dans l'église, ils étaient
là tous les deux et je les ai bien reconnus : le Pharisien
et le Publicain. Le Pharisien était grand, fort, sûr
de lui. Il a fait un large signe de croix avec l'eau bénite,
s'est avancé bien droit dans le milieu de l'allée,
a regardé tout autour avec son air supérieur, puis
il s'est mis à prier. Ah l'hypocrite! Le Publicain, c'était
une vieille dame toute courbée qui s'est glissée dans
l'allée de côté et a fait son chemin de croix
en marmonnant ses prières. Je n'entendais que des «
s » qui glissaient entre ses dents usées. Je les ai
regardés longuement l'un et l'autre, elle, la vieille éplorée,
lui, le pédant. Quand ils eurent quitté l'église,
j'ai décidé de partir à mon tour. C'est à
ce moment-là qu'une voix a retenti derrière moi :
« André, le Pharisien, c'est toi! » - «
Mais non Seigneur, je viens de le voir, le Pharisien avec son complet
chic, son air de businessman, son attitude dédaigneuse.»
Mais la voix a repris : « Vois-tu André, ce monsieur-là,
il a tout perdu dans la dernière crise économique.
Il est ruiné. Dans sa prière, il a juste demandé
la paix du cur. La vieille, elle, priait pour un petit-fils
en prison. Mais toi, tu n'as pas prié un seul instant. Tu
jugeais les autres. Tu n'as eu d'amour pour personne, pas même
pour la vieille dont tu te servais pour juger l'autre. Tu cherchais
un prétexte pour blâmer quelqu'un. »
Depuis ce jour-là, je me demande souvent si
le Pharisien ce ne serait pas moi aussi.
LIEN: Le monde est facile à juger quand il y a les bons
d'un côté, et les mauvais de l'autre. On se pense toujours
du côté des bons. Alors qu'en vérité
chacun de nous est à la fois Pharisien et Publicain et que
notre seule manière de nous en sortir est de renoncer à
juger autrui (André Beauchamp).
Chronique
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Prier pour la pluie?
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