La résurrection de Lazare. Vincent van Gogh, 1890. Huile sur toile, 35,5 x 49,5 cm. Musée van Gogh, Amsterdam (Wikipedia).

Hymne à Jésus, Christ, Résurrection et Vie éternelle

Julienne CôtéJulienne Côté | 5e dimanche du Carême (A) – 29 mars 2020

La résurrection de Lazare : Jean 11, 1-45
Les lectures : Ezéchiel 37, 12-14 ; Psaume 129 (130) ; Romains 8, 8-11
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

Le récit évangélique, choisi pour ce dimanche, présente un long développement, comme celui de la passion de Jésus. C’est le septième signe accompli par Jésus, après ceux de la noce à Cana, des guérisons de l’aveugle-né, du fils d’un fonctionnaire royal, du paralytique (Jean 2,1-11 ; 4,43-54 ; 5,1-8 ; 9,1-12). Alors que les synoptiques – Marc, Matthieu et Luc – utilisent le mot miracle, pour parler des actions de puissance de Jésus, l’évangéliste Jean, pour sa part, recourt au mot signe, évoquant ce qui est visible, observable, en pointant vers une signification autre, un aspect caché, au-delà de ce qui est extérieur. Plutôt que de s’intéresser à l’action extraordinaire, l’auteur s’intéresse au message porteur de foi (20,31), cette foi dont les disciples doivent vivre pour affronter le deuil à venir. La réanimation de Lazare est un signe, c’est-à-dire un fait révélateur de « l’être divin du Christ » ; il dissipe les ténèbres de la mort et fait accéder à la présence de Dieu, il fait voir l’éclat de la gloire de Dieu.

De la maladie de Lazare, à la foi de Marthe et Marie

À l’information envoyée par Marthe et Marie quant à la maladie de leur frère (v. 3), Jésus ne bronche pas pendant deux jours, alors qu’il existe une grande amitié entre ces quatre personnes. Cette apparente indifférence laisse perplexes les disciples. Pourquoi ne se précipite-t-il pas auprès de cette famille affligée? Deux jours plus tard, dans une décision inébranlable, le Maître décide de partir en Judée avec ses disciples. De s’exposer à la vindicte de ses adversaires comme ses disciples le prévoient, eux qui commencent à frémir : Rabbi, tout récemment, les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas? Et le Maîtrede répondre qu’il y va de la révélation du mystère de Dieu : Cette maladie ne conduit pas à la mort, elleest pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié… (vv. 4.9-11). Il leur dit clairement : Lazare est mort et je me réjouis de ne pas avoir été là, à cause de vous, pour que vous croyiez…(vv. 14-15). Alors Thomas, percevant la mort imminente de Jésus, prend la décision et entraîne les autres disciples avec lui (v. 16).

À son arrivée à Béthanie, c’est Marthe, l’aînée, femme courageuse, diligente, qui vient à la rencontre du Seigneur. Elle ne lui adresse pas un reproche (v. 21), mais en toute amitié, avec simplicité et délicatesse, lui exprime sa douleur : Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort (v. 21). Ce propos sera aussi celui de Marie, la contemplative aimante (v. 32). Les deux sœurs sont des disciples de Jésus. Marthe exprime sa confiance en Jésus, puis sa foi ; elle s’en remet à son initiative, à un acte de bienfaisance de sa part : Mais je sais que, maintenant encore, Dieu t’accordera tout ce que tu lui demanderas (v. 22). En affirmant sa foi en la résurrection, au dernier jour, à la fin des temps (v. 24), Marthe n’attend rien dans l’immédiat ; elle pressent, aspire, dévoile sa foi en la doctrine de la résurrection, à laquelle adhéraient les Pharisiens. Le peuple d’Israël a découvert la foi en la résurrection, au 2e siècle avant Jésus-Christ, au moment de la persécution du roi Antiochos Épiphane. Auparavant, on ne se préoccupait pas de la survie de l’individu, mais seulement de celle du peuple. Ce qui a provoqué le changement, c’est la découverte que Dieu n’abandonne pas à la mort ses créatures aimées.

Puis, Jésus poursuit son dialogue avec Marthe. Il lui dit : Ton frère ressuscitera. Elle comprend que ce sera au dernier jour. Alors, il rectifie en parlant au présent : Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; et tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela? (vv. 25-26). Elle répond par une profonde et fervente profession de foi en l’identité de Jésus, une foi décrite « comme tension » vers le Christ, « comme chemin » : Oui, Seigneur, tu es le Messie, je le crois ; tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde (v. 27). Jésus, à ce moment, dévoile le véritable sens de la résurrection eschatologique. La mort, au sens de séparation avec Dieu, n’existe plus, elle est vaincue dans la Résurrection du Christ. La vraie vie est la vie divine acquise pour l’éternité. La Résurrection qu’il révèle est une personne divine. L’expérience d’amour en Jésus constitue déjà la résurrection. L’adhésion transfigure, aujourd’hui, la vie en éternité, la vraie vie, la vie divine qui ne finira jamais (6,40). Qui vit en union avec le Christ ne meurt pas, même si le corps matériel meurt. Résurrection et Vie inaugurent « l’ère nouvelle de la Vie éternelle », une Vie qui ne finit pas, fondée sur le Christ Jésus, venu affronter et détruire l’ultime ennemi qu’est la mort. Après cet échange, Marthe partit avertir Marie. Celle-ci, éplorée, accourt rapidement vers Jésus et se jette à ses pieds. Elle est suivie par une foule de Juifs qui, toutefois, n’accéderont pas à l’intelligence du mystère, leur foi étant imparfaite et fragile.

Jésus, vainqueur de la mort, Seigneur de la Vie

Jésus fut bouleversé d’une émotion profonde, « troublé »…  il pleura… Son humanité éclate aux yeux de tous. Il perçoit à travers la douleur des deux femmes, celle de toute l’humanité affrontée à la mort. Cette réaction, comment l’expliquer? Jésus, à cette heure, est confronté à la mort de son ami Lazare, mais aussi, à la réalité de sa propre mort (Marc 13,34). Jésus n’est pas sans s’inquiéter de la réaction de ses disciples lorsqu’ils verront la mort de leur Rabbi. À la vue de l’échec apparent de sa mission, sauront-ils réagir solidement ? Vacilleront-ils au moment de sa mort, qui sera un défi pour leur foi? Jésus veut affermir leur foi, manifester que sa puissance défie la mort et que la victoire sur la mort sera définitive au moment de la résurrection, car Il est venu pour donner une vie qui ne peut être affectée par la mort. Tout homme qui vit et croit en moi, ne mourra jamais (v. 26).

Alors, Il leva les yeux vers le haut et dit : Père, je te rends grâce parce que tu m’as exaucé. Je savais bien, moi que tu m’exauces toujours… Après cela, il cria d’une voix forte : Lazare, viens dehors!... Déliez-le et laissez-le aller (vv. 33.35.39.41.43.44). Dans une confiance totale au Père, Jésus adresse une prière de demande et d’action de grâces (vv. 41-42). Lazare est réanimé, guéri de sa maladie ; il connaît un retour à la vie terrestre et entame un cheminement de foi authentique en Jésus, Résurrection et Vie (v. 25). Cette vie naturelle retrouvée est un signe avant-coureur de la résurrection du Christ, au matin de Pâques ; elle symbolise la vie éternelle en Dieu, cette vie que Dieu seul possède et que Jésus, Fils de Dieu, rend possible. En Lui, nous avons la vie sans fin, c’est en Lui que nous pouvons miser toute notre vie.

Le récit s’attarde aussi aux Juifs (vv. 8.16.19.31.33.45). Les uns croient (v. 45), mais d’autres refusent les signes, porteurs de la gloire de Dieu, porteurs de lumière et de vie, lors de la guérison de l’aveugle-né (9,1-41) et de la réanimation de Lazare. Face à ce miracle, des Juifs présents vont informer les autorités religieuses et politiques, dont Caïphe qui prononcera l’arrêt de mort de Jésus (v. 53).

Première lecture : Ézéchiel 37, 12-14

La vision des ossements desséchés qui représentent Israël, ce peuple anéanti, rejoint l’espérance de vie du texte évangélique. Au début du 6e siècle avant Jésus-Christ, le prophète Ézéchiel rejoint les premiers déportés à Babylone. Il découvre un peuple qui perd courage : Nos ossements sont desséchés, notre espérance a disparu… (v. 11). Alors, il se consacre à redonner l’espérance en proclamant l’oracle de Yhwh, toujours fidèle qui s’engage solennellement : Je vais ouvrir vos tombeaux…  je vous ramènerai sur le sol d’Israël…  Je mettrai mon souffle sur vous pour que vous viviez (vv. 12-14). Par son Esprit, Yhwh permettra un renouvellement spirituel des cœurs, avec le retour en Israël.

Deuxième lecture : Romains 8-11

Le texte du prophète Ézéchiel établit un lien entre l’Esprit et la vie spirituelle. Avec l’apôtre Paul, la vie du chrétien est une vie animée par l’Esprit à laquelle on acquiesce en Jésus, Christ ressuscité. Paul oppose la vie vécue sous l’emprise de la chair, où la créature se referme sur elle-même et se livre au péché, à celle vécue dans le Christ, inspirée par l’Esprit qui habite dans les cœurs. Paul nous interpelle, aujourd’hui, et nous demande ce qui influence et dirige notre vie de croyants. Est-ce que nous laissons l’Esprit orienter nos pensées et nos gestes, dans le service du prochain? Croyons-nous, que le Christ est en nous et que l’Esprit est vie, nous apportant joie et action de grâce (v. 10)?

Membre de la Congrégation de Notre-Dame, Julienne Côté a fait ses études supérieures en théologie et en études bibliques à l’Institut catholique de Paris. Elle a écrit pour la revue Vie liturgique de 1985 à 1990 et collabore au Feuillet biblique depuis 1987.

Source : Le Feuillet biblique, no 2657. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

Célébrer

Célébrer la Parole

Depuis l’automne 2017, le Feuillet biblique n’est disponible qu’en version électronique et est publié ici sous la rubrique Célébrer la Parole. Avant cette période, les archives donnent des extraits du feuillet publiés par le Centre biblique de Montréal.