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6e dimanche de Pâques C - 1er mai 2016
 

Un monde nouveau qui vient

Jésus annonçant le Paraclet aux Apôtres Détail de la Maesta de Duccio, Sienne, 1310

Jésus annonçant le Paraclet aux Apôtres. Détail de la Maesta de Duccio, Sienne, 1310

 

 

Le Paraclet, Jésus et le Père viendront vers ceux qui aiment Jésus : Jean 14, 23-29
Autres lectures : Actes 15, 1-2.22-29; Psaume 66(67); Apocalypse 21, 10-14.22-23

 

L'extrait de l'évangile de Jean (14, 23-29) fait partie du discours d'adieu de Jésus à ses disciples. Ceux-ci, à l'annonce du départ de leur Maître, vivent dans la peur et l'angoisse. Aux interrogations qui traversent leur esprit, Jésus va leur offrir un enseignement qui nous rejoint aujourd'hui.

L'avenir après la croix :
« La venue renouvelée » de Jésus.

     Les disciples sont confrontés à une perte qui les plonge dans une détresse profonde. Ils ne peuvent envisager la perspective d'être livrés à eux-mêmes, face à l'hostilité de différents groupes religieux de leurs milieux. Ils se sentent abandonnés, comme des orphelins (13, 18). Cela présage fort mal pour la mission qu'ils ont commencée. Face au bouleversement qu'ils vivent, Jésus leur dit : Que votre cœur ne se trouble pas: vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi (14, 1). À eux, les témoins privilégiés et à tous ceux qui croiront dans la suite des  époques,  Jésus fait la promesse inouïe d'un nouveau mode de présence : Vous me verrez vivant et vous vivrez aussi (14, 19). Toutefois, cette manifestation de Jésus se réalisera à une condition: l'amour qu'on lui portera, l'accueil de sa Parole : Si quelqu'un m'aime, il restera fidèle à ma parole; mon Père l'aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui (14, 23). Alors que les disciples pensent vraisemblablement à une manifestation visible, Jésus parle d'intimité, de cœur à cœur, d'une présence permanente dans l'expérience croyante et dans la communauté des disciples : Si quelqu'un m'aime...

     Dans le Premier Testament, durant tout le temps de l’exode,  la résidence de Dieu est la Tente de la rencontre. Plus tard, le Temple de Jérusalem devient le signe de la Présence de Dieu et seul, le grand-prêtre, une fois l'an, entrait dans le Saint des Saints. Pour les justes de cette époque, la Parole de Dieu était recherchée, approfondie. Les psaumes attestent maintes et maintes fois  ce désir d'aimer Dieu et cette conscience que les priants ont de la présence de Yahvé : Je me souviens, la nuit, de ton Nom, Yahvé, et je veux observer ta Loi... Les justes se réjouissent, ils exultent devant Dieu, ils dansent de joie (Psaumes 119, 55; 68, 4). Mais avec le Christ ressuscité, un élément nouveau apparaît, un renversement : Dieu « descend » dans l'âme de celui qui croit. Le Fils promet une communion personnelle, celle qui est vécue au sein de la Trinité, dans un éternel jaillissement d'amour et de vie.

Le don de l'Esprit Saint...

     Des versets 23-25 au verset 26, le récit nous fait passer du temps de la révélation décisive, celui de Jésus, à la période postpascale. L'expérience est accessible désormais dans une décision de foi, qui permet une relation intime avec le Christ et avec le Père, grâce à l'Esprit.

     Le Paraclet est envoyé par le Père, au nom de Jésus (14, 26). Il a comme fonction de rappeler l'enseignement du Fils, de faire comprendre en profondeur le mystère révélé par Jésus; Il est la mémoire vive qui actualise dans la communauté, par la prédication des apôtres, ce que Jésus a dit et fait. En définitive, la venue de l'Esprit permet l'intériorisation de la Parole, la fidélité à la Parole. Celle-ci est gage de l'habitation divine dans la communauté et dans les individus. Au fil de l'histoire de l'Église, le peuple de Dieu a dû innover, répondre aux questions nouvelles, apporter des éclairages aux problèmes qui surgissaient, aux mentalités qui évoluaient. C'est par l'Esprit que le discernement a pu se faire. Précisément, dès le temps apostolique, une situation conflictuelle va être résolue en priant l'Esprit (la première lecture : Actes 15, 1-2.22-29).

... à travers les siècles

     Les chrétiens d'origine juive voulaient imposer aux chrétiens, issus du paganisme, les prescriptions juives. Il est probable que ces Juifs pieux ont compris que la nouveauté apportée par le Christ pouvait se vivre à l'intérieur du judaïsme. Mais, avec l'arrivée de gens étrangers à Israël, fallait-il incorporer les nouveaux chrétiens au judaïsme? Devaient-ils se soumettre à l'ensemble des lois juives pour adhérer au Christ?  Car le rite de la circoncision, par exemple, n'est pas seulement culturel, il est aussi le sceau de l'Alliance de Dieu avec Abraham, le signe de l'adhésion à la loi juive (Genèse 17). En le conservant ne déclarerait-on pas inefficace la passion du Christ et le baptême? Dans l'Église naissante d'Antioche, la question de la circoncision  constitue  un problème grave où se joue un enjeu fondamental. 

     C'est à Jérusalem, sous l'autorité des Apôtres, qu'il trouvera une solution. L'extrait retenu déroule le rapport des missionnaires, Paul et Barnabé (15, 12), le discours prophétique de Pierre (15, 7-11 : première lecture) et, à la suite des délibérations de l'assemblée, la décision pastorale de Jacques (15, 13-21), à savoir que le rite de la circoncision ne serait pas imposé aux étrangers. Par ailleurs, la lettre envoyée à l'Église d'Antioche, rappelle quatre  prescriptions morales, appelées les règles des fils de Noé (Genèse 14, 9), répandues dans tout le Proche-Orient ancien, une sorte de « loi  naturelle » que tout homme doit s'efforcer d'observer. L'une d'entre elles a le souci d'une cohésion dans la communauté, à savoir éviter une pratique qui condamnerait leurs frères Juifs, à ne plus  fréquenter l'assemblée chrétienne, ou à  contracter une souillure légale : L'Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas faire peser sur vous d'autres obligations... (15, 28). Ce texte d'une grande richesse pastorale qui explose de vie, de grâce, de sérénité, peut être complété par la lecture de Galates 2, 1-21, où la crise vécue à Antioche est présentée par Paul, l'apôtre qui a ouvert aux païens la porte du salut.

     La présence de l'Esprit au sein de l'Église s'est manifestée depuis 2000 ans, et particulièrement dans un événement plus près de nous : le Concile Vatican II, annoncé par le Pape Jean XXIII qui, lors du discours d'ouverture, proclamait : « Aujourd'hui, l'Épouse du Christ, l'Église, préfère recourir au remède de la miséricorde plutôt que de brandir les armes de la sévérité ». Que d'études et de remises en question, pendant quatre années, que de partage  et de communion entre les 2400 évêques! Les orientations nouvelles ont été formulées dans des documents d'une richesse doctrinale inégalée, qu’on n'a pas fini d'approfondir et de vivre. L'Esprit Saint est toujours là, malgré les résistances et les lenteurs des chrétiens.

« C'est  ma paix que je vous donne »

     L'attitude inspirée des autorités de Jérusalem - ils ont écouté et prié - a permis la communion fraternelle et la paix entre des chrétiens de cultures religieuses différentes. Cette paix est un don promis par Jésus : C'est la paix que je vous laisse, c'est ma paix que je vous donne; ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne (14, 27). Elle n'est pas celle instaurée par des hommes. C'est la paix indestructible qui est en Dieu Trinité, en Dieu Amour. Cette paix est sa présence vivante au cœur des croyants et croyantes qui laissent de la place à Dieu dans leur vie. Le Premier Testament a présenté le Messie comme le prince de la paix, lemédiateur qui réconcilie. La paix  de ceux qui croient ne vient pas d'eux, et le célébrant ainsi que les fidèles doivent en être conscients au moment de la célébration eucharistique et dans leurs activités diverses.

     L'Apocalypse 21, 10-14.22-23 trace les contours du monde nouveau instauré par la résurrection de Jésus. Un monde achevé et lumineux qui  descend du ciel, sous les traits d'une ville qui n'a plus besoin de temple, car son Temple, c'est le Seigneur (21, 22), Dieu avec nous et pour nous, tout en tous (1 Corinthiens 15, 28).

 

Julienne Còté, CND

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2488. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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