INTERBIBLE
Au son de la cithare
célébrer la paroleintuitionspsaumespsaumespsaumes
off Nouveautés
off Cithare
off Source
off Découverte
off Écritures
off Carrefour
off Caravane
off Scriptorium
off Artisans

 

 
Célébrer la Parole

 

orant

Imprimer

33e dimanche ordinaire B - 15 novembre 2015

 

Confiance et espérance

Jésus Christ

 

 

La venue du Fils de l'homme : Marc 13, 24-32
Autres lectures : Daniel 12, 1-3; Psaume 15(16); Hébreux 10, 11-14.18

 

En cet avant-dernier dimanche de l’année liturgique B, nous lisons pour la dernière fois un extrait de l’Évangile de Marc. Dimanche prochain, le passage évangélique de la fête du Christ Roi sera tiré de l’Évangile de Jean. Or, la page d’évangile que nous lisons cette semaine a véritablement de quoi surprendre. On a peine à y voir une Bonne Nouvelle. En ces temps-là, après une terrible détresse, le soleil s’obscurcira et la lune perdra son éclat. Les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées (Mc 13,24-25). Serait-ce que Jésus avait prévu les changements climatiques qui caractérisent le début de ce troisième millénaire? Faut-il vraiment craindre des bouleversements cosmiques qui dépasseront de loin les tremblements de terre et tsunamis qui affligent déjà notre planète ? Le temps de l’« apocalypse » est-il donc arrivé?

L’annonce de deux passions

     Avant d’en venir à de telles conclusions, il importe de bien situer cette page d’évangile dans son contexte. Dimanche dernier, nous avons lu la fin du chapitre 12 de l’Évangile de Marc, où une pauvre femme a donné tout ce qu’elle avait pour vivre (Mc 12,44) en déposant deux piécettes dans le trésor du Temple. Au chapitre 14, juste avant que ne commence la passion, nous verrons une autre femme briser un flacon d’albâtre contenant un parfum très pur et de grande valeur (Mc 14,3) pour donner à Jésus une onction anticipée. « Ces deux « gaspillages » sont en fait des dons insensés qui donnent une tonalité particulière » 1 au discours de Jésus en Mc 13. Par leurs gestes audacieux, ces femmes annoncent le sacrifice que fera Jésus en donnant sa vie sur la croix. Or, tout comme Jésus qui va vers sa passion, les disciples de Jésus auront à vivre leur propre passion au cours des siècles. Le discours de Jésus veut donc les préparer à la passion, la sienne, mais aussi la leur. « Marc 13 enseigne aux disciples comment la passion et la résurrection de Jésus influent sur leur propre suivance dans le temps d’après Pâques. La passion de Jésus est le modèle d’une suivance fidèle dans les crises de la vie »2 .

La fin de l’histoire telle que nous la connaissons

     Dans une telle perspective, le soleil qui s’obscurcit, la lune qui perd son éclat et les étoiles qui tombent du ciel ne sont pas d’abord synonymes de cataclysmes planétaires. Ces événements indiquent plutôt un renversement de ce qui fut accompli au quatrième jour de création (voir Gn 1,14-18). Jésus indique donc que le rythme du temps, créé alors par Dieu, cessera en ces temps-là (Mc 13,24). « La description d’événements cosmiques […] met en évidence un désordre complet du monde céleste [… qui brisera] le rythme des nuits et des jours, autrement dit le calcul de la temporalité […]. Peut-on mieux marquer la fin du temps, la fin de l’histoire » ? 3

La naissance d’un monde nouveau

     Le monde tel que nous le connaissons cessera donc d’exister pour laisser place à une réalité radicalement nouvelle. Alors on verra le Fils de l’homme venir sur les nuées avec grande puissance et grande gloire (Mc 13,26). Jésus fait ici écho à la vision du prophète Daniel : Je regardais, au cours des visions de la nuit, et je voyais venir, avec les nuées du ciel, comme un Fils d’homme ; il parvint jusqu’au Vieillard, et on le fit avancer devant lui. Et il lui fut donné domination, gloire et royauté ; tous les peuples, toutes les nations et toutes les langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite (Dn 7,13-14).

Une parole d’espérance

     Cette vision de Daniel annonce le grand jugement final. Mais ici Jésus précise que le Fils de l’homme enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde [ou, plus littéralement « des quatre vents »], de l’extrémité de la terre à l’extrémité du ciel (Mc 13,27). Or, « les « quatre vents » sont mentionnés dans un oracle du Seigneur en Za 2,10. Dans le texte hébreu, il est écrit : « aux quatre vents des cieux je vous ai dispersés », tandis que la LXX [le texte grec] dit le contraire, en parlant de rassemblement : « des quatre vents du ciel, je vous rassemblerai » » 4. Il n’est plus question de jugement comme chez Daniel, ou bien de châtiment comme dans le texte hébreu de Zacharie, mais bien d’un rassemblement universel. En se plaçant dans la ligne du texte grec de Za 2,10, Jésus nous annonce donc la venue d’un monde nouveau d’une manière qui devrait nous rassurer. « En effet, au lieu de remplir la fonction de juge qui lui est classiquement attribuée, le Fils de l’homme réunira les élus dans une perspective universaliste en une communauté dont il assurera le leadership »5.

Comment se préparer au monde nouveau?

     Reste à savoir comment le disciple de Jésus peut se situer en face de cette bonne nouvelle. Il faut d’abord éviter les calculs visant à déterminer quand surviendront ces événements. La conclusion de la page d’évangile de ce dimanche l’indique clairement. Quant au jour et à l’heure, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père (Mc 13,32). Si même Jésus ressuscité ne connaît pas le jour et l’heure de l’avènement de ce monde nouveau, il est inutile de hasarder de vaines prédictions. Mais si tel est le cas, comment interpréter la déclaration énigmatique de Jésus : Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive (Mc 13,30)? Plusieurs générations ont passé depuis ces paroles. Jésus se serait-il trompé? Comment alors le croire quand il déclare : Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas (Mc 13,31)?

     Le « tout cela » dont parle ici Jésus représente l’avènement du Règne de Dieu dont les bouleversements décrits en Mc 13,24-25 sont le signe. Or, quand Jésus, après avoir été baptisé par Jean et avoir vaincu le tentateur, revient en Galilée, il proclame : Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche (Mc 1,15). Avec sa résurrection, non seulement le Règne de Dieu est proche, il est déjà commencé ! Il n’est toutefois pas pleinement accompli parmi nous. C’est le mystère du « déjà là mais pas encore pleinement ». Jésus n’a donc pas tort, cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive (Mc 13,30). Le Règne de Dieu est là au milieu de nous même si nous ne le voyons pas encore clairement, même s’il ne sera pleinement accompli qu’au moment du retour du Fils de l’homme parmi nous. Nous pouvons donc avoir confiance en Jésus ressuscité dont les paroles ne passeront pas (Mc 13,31).

En observant le figuier

     Prenons donc au sérieux son invitation : Que la comparaison du figuier vous instruise : Dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche (Mc 13,28). « Par opposition à la plupart des arbres de Palestine, le figuier perd ses feuilles l’hiver. Alors que l’amandier fleurit très tôt, le figuier est plus tardif. Mais lorsqu’au printemps son bois se remplit de sève et donne l’impression de devenir tendre, il bourgeonne et ses premières feuilles annoncent la proximité de l’été » 6. Malgré les apparences, nous savons que le Règne de Dieu est proche. Pour nous y préparer, à l’invitation de Jésus, choisissons la confiance et l’espérance.

_____________

1 Camille Focant, L’évangile selon Marc (CBNT 2), Paris, Cerf, 2004, p. 478.

2 T.J. Geddert, Watchwords : Mark 13 in Markan Eschatology (JSNTS.S 26), Sheffield, 1989 ; cité et traduit par Focant, L’évangile selon Marc, p. 479.

3 Focant, L’évangile selon Marc, p. 498.

4 Focant, L’évangile selon Marc, p. 501.

5 Focant, L’évangile selon Marc, p. 500.

6 Focant, L’évangile selon Marc, p. 503.

 

Yvan Mathieu, SM

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2464. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

Chronique précédente :
Le don inversé, le don gaspillé?