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17e dimanche ordinaire B - 26 juillet 2015

 

Comment donner à manger

Détail de la mosaïque de la multiplication des pains et des poissons

Détail de la mosaïque de la multiplication des pains et des poissons.

 

 

Jésus nourrit cinq mille hommes : Jean 6, 1-15
Autres lectures : 2 Rois 4, 42-44; Psaume 144(145); Éphésiens 4, 1-6

 

En ce 17e dimanche ordinaire, nous abordons la série des dimanches sur le Pain de Vie. Aujourd’hui il sera question, sous la plume de l’évangéliste Jean, du récit de la multiplication des pains. Pour bien saisir la facture du récit, il ne faut pas perdre de vue que les récits johanniques sont articulés autour des grandes fêtes juives : la fête de la Pâque, celle des Tentes et celle de la Dédicace du Temple. L’événement présenté aujourd’hui se passe à quelques jours de la Pâque. Plus précisément au moment des premières récoltes de l’orge.

Au-delà du signe

     Le récit johannique est soucieux d’ajouter, en introduction, pourquoi une grande foule suivait Jésus : Parce qu’elle avait vu les signes qu’il accomplissait (Jean 6, 2). Ce qui donne tout son sens à la multiplication des pains. Il sera donc question du pain du jour, bien entendu, mais l’auteur veut nous amener plus loin. En d’autres mots, le disciple bien-aimé transcendera l’événement ponctuel dont nous sommes témoins aujourd’hui pour nous faire saisir, à mesure que la péricope se déroulera (vv. 60-69), la Vie véritable que Jésus nous communique par le Pain de son corps dans l’eucharistie. Mais ne brûlons pas les étapes.

Une foule affamée

     De toute évidence, Jésus nourrit une foule non pas suspendue à ses lèvres mais à ses gestes. Elle attend qu’on la nourrisse car elle est affamée. Jésus l’a saisi. Aussi il donnera à manger avec le pain d’orge employé lors du repas pascal. Belle allusion au passage que Jésus s’apprête à vivre. Retenons également que si la foule a suivi Jésus, c’était aussi pour entendre son message. Nous discernons donc une autre faim qui elle, ne s’apaise pas avec du pain matériel. Fut-il pétri avec la plus riche farine. Ce pain spirituel devient alors le signe d’un Pain de Vie qui nourrit éternellement. Ce langage est difficile à saisir et la suite du texte nous le fera découvrir dans les dimanches subséquents. Nous y reviendrons.

Les restes du pain

     Retenons un détail dans le déroulement de cette scène champêtre. Détail qui est loin d’être anodin. Vous aurez remarqué que l’auteur du récit passe presque sous silence le fait qu’un jeune garçon avait en plus des cinq pains d’orge, deux poissons (v. 9). Pourtant Jésus a dû multiplier aussi ces deux poissons puisque tous en reçoivent (v. 11). Mais, comme chacun le sait, les poissons ne se conservent pas. C’est pourquoi l’évangéliste nous présente un Jésus soucieux de ce que les restes du pain soient ramassés : Il dit à ses disciples : amassez les morceaux qui restent pour que rien ne soit perdu (v. 12). Il va jusqu’à préciser qu’ils en remplirent douze paniers. Plusieurs commentateurs nous confient qu’il faut reconnaître dans ce souci de conserver les restes de pain, la permanence du Pain Nouveau qui sera confié aux apôtres et à l’Église. Belle et fine congruence à mon sens.

Le réalisme de l’incarnation

     Nous sommes pour la plupart des rationnels, des cartésiens diront plusieurs. À cause de cette mentalité, nous ne sommes pas portés à donner de l’importance au réalisme de l’Incarnation. Pourtant ce réalisme est porteur d’un enseignement fondamental. Pour le vérifier, posons-nous la question : est-ce que nous saisissons que le geste de labourer, de semer, de récolter et de distribuer le pain aux affamés c’est être à l’avant garde du combat pour la justice distributive? Selon le langage de l’évangile, ce sont ces gestes qui font advenir le Royaume. Ils permettent de prendre part à la mission d’évangélisation confiée à l’Église du Christ. J’ai lu quelque part qu’il suffirait de planter du soya à l’échelle planétaire pour que la faim cesse dans le monde. Le soya contiendrait à lui seul tout ce qu’il faut pour grandir et demeurer en santé. Utopie, angélisme? Reste à voir.

L’autre faim

     Les medias nous l’écrivent et nous le chantent sur toutes les tribunes : aujourd’hui encore des personnes ont faim. Mais ont-elles faim que de pain de farine? Sont-elles conscientes pour plusieurs qu’elles sont pauvres du pain qui nourrit l’âme et l’esprit? Parmi les personnes que nous côtoyons, celles qui gagnent leur pain quotidien en ajoutant des heures et des heures à leur horaire nous confie qu’il leur reste peu de temps pour creuser et lire la Parole. Quoi entreprendre pour apaiser la faim spirituelle de ces personnes qui osent demander à manger? Comment nourrir les autres alors qu’ils ne semblent pas souffrir de cette faim-là? Le champ est immense et risque de devenir une terre en friche si nous cessons de remuer le sol. Soyons inventifs.

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2448. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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