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2e dimanche de Pâques A - 27 avril 2014

 

Heureux qui croit sans avoir vu

 

Jésus apparaît à ses disciples : Jean 20, 19-31
Autres lectures : Actes 2, 42-47; Psaume 117(118); 1 P 1, 3-9


L'évangéliste Jean présente les apparitions de Jésus à ses disciples. Au soir de la deuxième rencontre, tous sont présents, y compris Thomas, absent lors de la première visite et qui, depuis, refuse le témoignage de ses frères.

Thomas, notre jumeau

     L'évangile mentionne que ce disciple demande des preuves et tient à vérifier certains dires. En fait, Thomas, dont le nom signifie « jumeau », ne fait pas confiance à ses amis. Certes, il est bouleversé lui aussi par la mort du Christ, mais spontanément, il vit en conformité avec les valeurs ambiantes et l'ordre établi. Réaliste et sincère, il n'accepte pas ce que les autres lui rapportent et n'adhère pas à la condition nouvelle de Jésus ressuscité. Il semble s'enfermer dans le « voir » et s'isole des siens : Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt à l'endroit des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je n’y croirai pas (v. 25).

     À la deuxième apparition de Jésus, Thomas fait l'expérience du Ressuscité, comme les autres disciples, la semaine précédente. Notons qu'il n'est pas dit que Thomas ait mis ses mains dans les plaies de Jésus. A-t-il la preuve souhaitée ? Non! cependant il accueille la parole du Ressuscité qui lui permet de dépasser ce que les sens ne réussissent pas à saisir. Et alors, en toute confiance, il proclame : Mon Seigneur et mon Dieu. Quelle magnifique confession! Elle emprunte des versets du Premier Testament (Psaumes 30, 3; 35, 23-24; 2 Samuel 7, 28). À ce moment, le Seigneur Jésus fait accéder Thomas à un sommet ultime et réintègre le sceptique dans la communauté.

Le cheminement de foi

     L'attitude de Thomas est fort différente de l'attitude de Jean, le disciple bien-aimé au regard pénétrant. Ce dernier voit les signes et il croit sur le champ (20, 8). Il accueille l'impulsion donnée par l'Esprit et regarde au-delà des traces de la mort. Bien souvent, nous sommes le jumeau de Thomas dont l'attitude nous indique comment les épreuves rencontrées conduisent à un cheminement de foi véritable. Les doutes et les questionnements rejoignent l'esprit des baptisés et les invitent à dépasser sans cesse l'étroitesse de leurs perceptions, de leurs prétentions et de leurs mécanismes humains. Au fil des jours et des mois, le disciple apprend à vivre avec des questions provisoirement sans réponse; il éprouve un malaise à s'ouvrir à ce que Dieu rend possible. Et pourtant, la vie, avec ses épreuves et ses contrariétés, constitue la route d’une recherche patiente de la Lumière, celle qui émane d'une Parole évangélique, ressassée par un coeur humble, capable de s'abandonner. Pour le baptisé, c'est un réel passage de la mort à la vie, dans tout ce que cela comporte de paradoxal.

Une béatitude inouïe

     Heureux ceux qui croient sans avoir vu! Quel éloge de la part du Christ! Regardons Paul, Barnabé et Luc, les Pères de l'Église, les martyrs des trois premiers siècles du christianisme et tous les chrétiens à travers les âges. Ils ont cru sans voir. La béatitude s'adressait encore à eux et elle s'adresse à nous, aujourd'hui. La multitude des baptisés n'ont de cesse de s'appuyer sur le témoignage des disciples de Jésus, ils sont appelés à accueillir la Parole et à y engager leur foi.

     Nous pouvons nous demander jusqu'où nous essayons de saisir ce qui est vertigineusement nouveau dans l'événement de la Résurrection afin de vivre de la joie divine, de nous réjouir de la lumière dont le Ressuscité est inondé et qu'il partage avec ses disciples. Nous sommes invités à accueillir l'irruption d'une création nouvelle ne demandant qu'à éclore, d'une révolution ouverte sur un avenir insoupçonné. Notre capacité de recevoir est plus grande que ce que nous prétendons; notre soif de Dieu est plus vive et plus grande que l'évaluation que nous en faisons; Dieu réalise en nous une oeuvre beaucoup plus étendue que ce que notre intelligence et notre expérience pressentent.

     Dans la première apparition, il est affirmé que les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur (v. 19). Cette joie découle de leur foi dans leSeigneur et de la gloire du Père qui habite le Christ. Quel moment intense et sublime de communion et de grâce!

Le Souffle nous est donné

     Le Seigneur Jésus dit : La paix soit avec vous! De même que le Père m'a envoyé, moi aussi, je vous envoie. Ayant ainsi parlé, il répandit sur eux son souffle, et il leur dit : 'Recevez l'Esprit Saint ... '. Il répandit son souffle. Tout de suite, nous nous souvenonsdu deuxième récit de la création en Genèse : Yhwh Dieu fabrique un adam poussière qui vient du sol, souffle la vie dans ses narines, l'adam se met à vivre (Gn 2, 7; La Bible nouvelle traduction, Bayard). Dans le Premier Testament, le mot grec traduit par insuffler, n'estemployé que dans deux autres textes: celui de Sagesse et celui d'Ézéchiel où il estquestion des os desséchés, sans souffle : Car il (le potier qui modèle un dieu vain) a méconnu celui qui l'a modelé, qui lui a insufflé une âme agissante, inspiré un souffle vital (Sa 15, 11).... Yhwh parle : Viens souffle, des quatre vents!. Souffle dans ces morts, ces massacrés, qu'ils vivent!' Je prophétise comme il m'en a donné l'ordre et le souffle vient en eux, ils reprennent vie, ils se dressent sur leurs pieds- c'est une immense armée (Ez 37, 9).

     À la lumière de ces trois textes, ils nous est donné de saisir ce que la résurrection prépare comme éclosion, elle laisse voir l'apparition inimaginable d'une création restaurée, d'une surabondance de vie dans le Christ ressuscité. Et on peut mieux comprendre Paul, l'apôtre des nations, qui réprouve et désactive les sagesses de son époque, lorsqu'il écrit : Comme c'est écrit : 'L'oeil ne l'a pas vu, ni l'oreille entendu, le coeur humain n'en fut jamais atteint, Dieu l'a préparé pour ses amants : Oui, Dieu nous l'a dévoilé à travers le Souffle. Le Souffle explore tout, même les profondeurs de Dieu (1 Corinthiens 2,9-10).

     La présence de l'Esprit agissant au coeur de tous et toutes, le témoignage des premiers disciples fidèles et dévoués à leur Seigneur, jusqu'au martyre, ainsi que le témoignage fervent de nos soeurs et frères croyants d'aujourd'hui sont autant de phares dans la nuit à quiconque cherche au-delà du visible la présence de l'Innommable. Soyons dans l'action de grâce pour ces moments d'éveil qui surgissent à l'improviste, comme des éclairs. Ils réchauffent notre coeur, nous permettent d'accéder à une autre réalité, à un espace de foi et d'espérance.

Quatre critères

     La foi est un don gracieux de Dieu. De son côté, le baptisé s'engage intimement et résolument comme l'indique la première lecture tirée des Actes des Apôtres (2, 42-47). Le texte évoque un critère fondamental pour grandir dans la foi, soit l'appartenance à une communauté de foi qui affermit et soutient ses membres, alors que l'éloignement conduit au geste de Thomas (v. 42).

     Au milieu de toute communauté chrétienne, les croyants accueillent l'enseignement des apôtres par l'intermédiaire des homélistes, et aussi, selon les circonstances, par l'échange des participants sur les récits évangéliques; ils participent à la fraction du pain en faisant mémoire de la vie de Jésus, de sa mort donnée jusqu'à l'extrême et de la résurrection du Seigneur Jésus; ils vivent la communion fraternelle de différentes façons, mais tout particulièrement en soulageant les souffrants de la communauté qui manquent de ressources matérielles ou sont plongés dans des épreuves mortifères. Donc, vie de prière et de communion, vie de partage avec les démunis, en se rappelant toujours que le fondement du peuple de Dieu, c'est le Seigneur ressuscité. Sachons reconnaître l'apport d'une communauté vivante, dynamique et aimante.

 

Julienne Côté, CND

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2401. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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