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Commémoration des fidèles défunts - 2 novembre 2014

 

Dans la noirceur, l'espérance !

 

Discours sur le pain de vie : Jean 6, 37-40
Autres lectures : Sagesse 4, 7-15; Psaume 27(26); Romains 14, 7-9.10b-12

 

Le calendrier liturgique a été souvent perturbé en 2014.  Certaines fêtes ont eu priorité sur les dimanches ordinaires.  C’est encore le cas aujourd’hui. La mémoire des fidèles défunts interrompt le flot des dimanches de l’Année A. Le Lectionnaire du dimanche nous invite officiellement à être attentifs aux lectures bibliques suggérées pour les funérailles. En fait, cette liste offre un choix étourdissant. Le Lectionnaire des funérailles des adultes offre plus de soixante-dix possibilités, alors que le Lectionnaire des funérailles des enfants en suggère vingt-cinq.  Sans vouloir brimer la liberté du prêtre qui préside l’Eucharistie en ce dimanche, nous commenterons les lectures prévues par l’équipe du Prions en Église.

     Nous allons ainsi explorer un amalgame biblique consistant. Le livre de la Sagesse, la Lettre aux Romains et l’Évangile selon Jean offrent un message vigoureux. Il s’inscrit à contre-courant des actuelles pratiques qui masquent le drame de la mort et qui étouffent le message d’espérance chrétien. Les affirmations des lectures risquent même de causer un choc culturel. Elles prennent le contrepied des négations populaires du message chrétien sur la mort. Nous vous en avertissons dès maintenant : ce n’est pas avec de tels propos bibliques que nous allons nous faire des amis dans les médias et dans le grand public…

Bienvenue dans la vie éternelle (Jean 6, 37-40)

     Dans le quatrième évangile, le long chapitre 6 déploie les conséquences pour la foi d’un signe étonnant donné par Jésus : la multiplication des pains. L’extrait proclamé aujourd’hui rapporte les propos de Jésus sur l’appartenance ferme des personnes qui donnent leur foi au Fils envoyé par le Père. Jésus n’est pas venu pour « jeter dehors » celui qui vient à lui. Jésus ne veut perdre aucun de ceux et celles qui lui sont donnés par le Père.

     Jésus est venu pour inclure, et cela sera possible pour longtemps : La volonté de mon Père, c’est que tout homme qui voit le Fils et croit en lui obtienne la vie éternelle; et moi, je les ressusciterai au dernier jour (v. 40). La perspective ultime, pour l’humain qui accueille dans la foi le Fils envoyé du Père, c’est donc un relèvement sans équivoque au terme de l’histoire humaine. Une proposition qui contredit toutes les apparences mortifères de la vie biologique !

Vous n’êtes pas abandonnés à vous-mêmes (Romains 14, 7-9.10b-12)

     Quand Paul clôt sa longue lettre aux Romains, il ne se gêne surtout pas pour leur laisser des conseils pratiques. L’extrait proclamé aujourd’hui est porteur d’une bonne nouvelle : Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur. En fait, à l’époque de Paul, une telle affirmation était facilement recevable et source de grand réconfort. Les gens tenaient à vivre reliés à des personnes plus puissantes et généreuses, les « patrons ». Quand on avait la chance d’être le « client » d’une telle personne, plein de bonnes choses devenaient possibles au quotidien : réputation, travail, ressources, relations…

     La même affirmation de saint Paul, prononcée dans le contexte de notre société, a une toute autre résonance. Pour des Nord-américains qui survalorisent l’autonomie et l’accomplissement personnel, une vie et une mort «pour le Seigneur» peuvent sembler encombrantes, voire paralysantes. Vu les réticences propres à notre culture, il faut donc un certain doigté pour présenter les affirmations pauliniennes. L’actualisation de ces propos exige des explications pour que soit appréciées les propositions de l’Apôtre des nations en fonction de leur contexte d’origine.  Cette appréciation étant acquise, les auditeurs de notre pays sauront probablement y voir leur profit. Car il s’agit d’une libération fantastique!

     Jésus, choisi par Dieu, a vécu l’expérience du passage par la mort vers la vie donnée. Autrement dit, croire en lui, c’est croire en quelqu’un qui connaît les enjeux ultimes de l’existence. Et, paradoxe des paradoxes, ce lien d’appartenance est utile pour le moment décisif du « tribunal de Dieu ». En ce moment ultime de vérité, « chacun de nous devra rendre compte à Dieu pour soi-même ». La plus grande appartenance qui soit deviendra, paradoxalement, une source salvatrice pleine d’autonomie.

Vivre au-delà des apparences (Sagesse 4, 7-15; Psaume 26)

     Le livre de la Sagesse nous transmet des réflexions profondes qui avaient cours juste avant l’époque qui a vu naître Jésus. Les propos sur la mort sont particulièrement utiles. En effet, devant le scandale d’une mort subie avant la pleine maturité, la réflexion croyante renverse la perspective. En voyant les choses du point de vue de Dieu, on cesse de crier à l’injustice. On constate plutôt que la valeur d’une vie ne se mesure pas seulement en fonction de sa durée.

     On peut alors éprouver de l’espérance devant le parcours abrégé d’un juste : Arrivé au but en peu de temps, il a couvert une longue route. Dieu veille sur ses amis, mais pas toujours d’une façon conventionnelle. Avec un tel allié, comme dit le psaume, … j’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants.

Un début de mois plein de vie

     En deux jours, deux fêtes viennent activer notre mémoire et notre désir de partager la sainteté de Dieu. La Toussaint (samedi) et la Commémoration des fidèles défunts (dimanche) s’inscrivent sur le seuil de novembre au moment où nous sommes happés par la noirceur automnale. Voilà un contrepoids salutaire à la mélancolie ambiante qui succède à la surexcitation un peu artificielle de l’Halloween. L'Église offre à ses enfants bien-aimés des moments de joie et de lumière. Elle nous fait regarder au-delà des ténèbres qui semblent ridiculiser l'espoir de s'en sortir un jour.

     Nous pouvons vivre les premiers jours de novembre comme toujours : dans l'habitude, dans l'indifférence, dans l'inconscience. Nous pouvons aussi réfléchir, dépasser notre habitude, voire notre inertie spirituelles. Ces étapes importantes du calendrier nous posent des questions de fond. Toussaint et Commémoration nous obligent à arrimer nos gestes à nos convictions. Tout le contraire de l’Halloween!

     Les marchands exploitent, depuis quelques années, une tradition nordique d’automne très populaire aux États-Unis. La célébration sociale du 31 octobre ridiculise la mort. Elle est devenue presque aussi importante pour le commerce que Noël. Nous jouons à nous faire peur, par sorcières et fantômes interposés. Comme pour exorciser notre propre peur devant la mort…

     La désormais très médiatisée fête de l'Halloween (littéralement : « la veille de la fête de tous les saints ») n'engage les convictions de personne. Se déguiser en sorcière ou en fantôme n'a généralement aucune conséquence pour le lendemain. Sitôt la journée de fête passée, les costumes rangés, nous oublions bien vite maquillages et déguisements. Cette fête ne dure qu'un moment.  Elle n'impose aucun engagement à long terme. Cette fête est pourtant une parabole de notre vie compartimentée. Ce que je laisse voir aux autres n'a pas toujours rapport avec ce qui se passe et ce que je suis dans les profondeurs de mon être...

     Il en va autrement de la Toussaint et de la Commémoration des fidèles défunts. Ces fêtes mesurent le sérieux d'un engagement de foi. Pour cette raison, les deux fêtes liturgiques sont rarement évoquées dans les médias... La Toussaint pose la question de l'accueil, au cœur du quotidien, de la sainteté partagée par Dieu. Et la fête de la Mémoire des fidèles défunts élargit encore davantage l’horizon. Elle propose clairement la portée ultime et éternelle de la foi pour toute personne baptisée.  Donc, pour chacune et chacun de nous…

 

Alain Faucher, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2419. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Dieu est amour.
Celui qui aime est né de Dieu.