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Célébrer la Parole

 

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5e dimanche ordinaire C - 7 février 2010

 

 

Toute une pêche!

Jésus appelle ses premiers disciples : Luc 5, 1-11
Autres lectures : Isaïe 6, 1-2.3-8; Psaume 137(138); 1 Corinthiens 15, 1-11

 

Il y a une belle évidence au sein de la première communauté chrétienne observée par Luc. L’Esprit de Dieu y travaille activement. D’ailleurs le livre des Actes le confirme sans équivoque : Chaque jour, le Seigneur adjoignait à la communauté ceux qui seraient sauvés (Ac 2, 47). Cette activité apostolique et les succès remportés par la prédication de la Parole n’ont d’autres origines que celle du Seigneur Jésus lui-même. Ce Seigneur, maintenant ressuscité d’entre les morts, a voulu dès le début de son ministère public s’adjoindre des hommes du peuple pour proclamer l’urgence de la conversion et le pardon des péchés en son nom. Ce ministère, il l’a inauguré d’abord en Galilée (Luc 4, 14-42) puis ensuite par toute la Judée.

L’Église de Pierre

     Jésus s’était rendu dans un lieu solitaire, loin de la foule (Lc 4, 42). Puis il revient au bord du lac de Génésareth pour s’adresser à cette foule qu’il a voulu fuir. Comme s’il voulait mieux l’embrasser du regard, il emprunte la barque de Simon. Cette belle familiarité nous permet de faire des rapprochements symboliques avec la barque de l’Église dont Simon Pierre sera l’assise et le chef. Donc après avoir donné son enseignement, Jésus demande à Simon de retourner au large même si la nuit a été infructueuse (Lc 5, 4). Avouons que c’était beaucoup demander à des pêcheurs d’expérience, à des hommes qui connaissaient toutes les ficelles du métier que de retourner en mer. C’est que Luc, qui a le sens du théâtre, s’apprête à monter une magnifique mise en scène pour la suite des choses.  En effet, le miracle du filet qui se rompt sous les fruits de la pêche donnera à Pierre l’occasion de formuler une admirable prière d’adoration et un aveu touchant de sa condition pécheresse (v. 8). Aveu qui ressemble à celui d’Isaïe (Is 6, 5).

L’invitation à la confiance

     Devant l’effroi de Pierre, Jésus prononce cette magnifique parole empreinte de tendresse : Sois sans crainte.  Puis il trace à ce dernier, son destin apostolique : Désormais ce sont des hommes que tu prendras (v. 10). Même si cet avenir ecclésial semble être celui de Pierre, il concerne aussi la mission des douze. La suite du récit le précise et le « désormais » en marque le début. Comme si la parole accomplissait déjà ce qu’elle annonce. Elle confirme un engagement qui sera celui de toute une vie : Laissant tout, ils le suivirent (v. 11).

     Cette invitation à avoir confiance, à ne pas craindre, nous ramène aux paroles que Luc mettra sur les lèvres de Jésus ressuscité après le départ des compagnons d’Emmaüs : Pourquoi avez-vous l’esprit bouleversé? (Lc 24, 38). Décidément, Luc a de la suite dans les idées!

Le souci du pécheur

     Simon Pierre ne le sait pas encore mais il apprendra sous peu, de la bouche même de Jésus, que son Maître aura le souci du pécheur : Je ne suis pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs (Lc 5, 32). Paul l’atteste en affirmant que le Christ est mort pour nos péchés (1 Co 15, 3). L’aveu de l’apôtre l’avantage, si on peut s’exprimer ainsi. De pêcheur de poissons, il deviendra, à la suite de Jésus, pêcheur de ses frères et de ses sœurs pour les guider sur le chemin qui mène au Royaume du Père. Si Pierre avait fait valoir ses compétences, ses habiletés, sa longue expérience pour refuser de retourner en mer, il n’aurait pas reçu sa mission d’apôtre. Cependant, le chef de l’Église du Christ, restera ce qu’il est : simple, spontané, instable, prompt à s’enflammer autant qu’à se décourager. Ardent et lâche jusqu’à la trahison. C’est cet homme imparfait, ce pécheur semblable à nous et à beaucoup d’autres qui suivra Jésus pas à pas durant trois ans. C’est aussi ce même homme qui se verra confirmé dans son rôle de Chef.

Le pardon sans mesure

     Jésus n’oubliera jamais l’aveu de Pierre de se reconnaître pécheur. L’aveu de se trouver indigne en sa présence. Plus tard, Jésus croisera le regard de son apôtre quelques instant à peine après la suprême trahison et il découvrira dans ses yeux un regret innommable pour sa faute. Faute que son Maître s’empressera d’effacer par un élan de miséricorde vaste comme la mer! Ce pardon sans mesure révélera à Pierre à quel point il est aimé. Et cela malgré et jusque dans sa chute! S’il n’avait été cet homme avec ses contradictions, il n’aurait jamais pu croire à un tel amour. Il n’aurait jamais pu témoigner de la résurrection de son Seigneur. Pierre ressemble en cela à tous ces gens qui doivent descendre dans les contrées les plus honteuses de leur être pour comprendre l’amour de Dieu. Il leur faut tomber très bas pour gravir ensuite les sommets.

La leçon du miracle

     En lisant ce merveilleux récit, nous pouvons n’en retenir justement que le merveilleux. Ou encore rejoindre les sceptiques qui, sourire en coin, ajoutent que « c’est trop beau pour être vrai »? Aux uns et aux autres je pose la question : Comment survient dans nos vies l’extraordinaire, pour ne pas dire le miracle? Quand je suis découragé, à bout de ressources, déçu par des insuccès, est-ce qu’une parole d’encouragement à lancer à nouveau le filet n’est pas venue me redonner confiance? Quand j’ai pris des risques et que ces risques m’ont conduit à des résultats surprenants, n’est-ce pas un peu l’audace d’avancer au large malgré tout qui est responsable de mon succès?

     L’extraordinaire de ma vie ne sera jamais raconté mais il se manifeste, sinon à chaque jour, du moins à des périodes cruciales semblables à celles des pêcheurs du lac. Ils connaissaient la vie et la mer. Ils ont dû quitter les rives de la sécurité pour le large de l’imprévu. C’est simplement l’anecdote ou la situation qui changent…

L’importance d’un lien

     Au moment où j’écris ces lignes, j’apprends que deux skieurs égarés auraient pu avoir une triste fin s’ils n’avaient été reliés à la base d’où ils étaient partis. Quelques semaines auparavant, la mort d’un autre dépendait de ce manque : personne n’était au courant de son départ. Si cela est vrai pour les sportifs, qu’ils soient skieurs, alpinistes ou marins, la liaison est essentielle. Leur survie en dépend. Quand on peut compter sur d’autres lorsque survient le malheur ou une situation malencontreuse, l’aventure n’est plus un piège mais un défi qui permet le dépassement. Si la solidarité est un phénomène humain indispensable, la solidarité spirituelle l’est tout autant. On ne va pas à Dieu tout seul. On n’atteint pas le ciel en solitaire. Dieu nous a donné des relais, des lieux de halte. Il nous a donné surtout un Pain de réconfort, une Parole de vie, des pasteurs éclairés, même si ces derniers ne sont pas parfaits, pas plus que ne l’étaient Isaïe, Paul et Pierre, mais ils ont été consacrés pour accompagner, conseiller et soutenir leurs frères et sœurs. Et Dieu sait combien s’en rendent dignes!

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2216. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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