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1er dimanche de Carême B - 1er mars 2009

 

 

Le Christ dans la lutte contre le mal

Baptême et tentation de Jésus : Marc 1, 12-15
Autres lectures : Genèse 9, 8-15 ; Psaume 24(25) ; 1 Pierre 3, 18-22

Le baptême de Jésus n’est pas aussitôt terminé que survient le moment de la tentation. C’est une bataille dramatique qui se déclenche après l’immersion dans le Jourdain, un épisode plein de douceur et de lumière. Un détail qu’on ne peut rater, tellement il paraît inusité : c’est l’Esprit qui pousse Jésus au désert. L’évangéliste Marc veut souligner ainsi que le Messie va accomplir une action sainte conforme à la volonté de Dieu.

La Bible nous a accoutumés à des guerres entre Israël et des armées protégées par des dieux étrangers. Ici, Jésus sort du rang des disciples de Jean Baptiste. Il est comme un champion qui se détache de la troupe des hommes rangés en bataille. Il s’engage dans un combat singulier un peu à la façon de David délégué pour affronter Goliath. Cela se passe au désert où une tragédie longue et violente va se déclencher loin des enfants et des innocents : les coups ne doivent pas les atteindre par accident. L’arme de Jésus sera la patience.

Au baptême, l’Esprit Saint était descendu sur lui comme une colombe, l’oiseau symbole de paix depuis les jours du Déluge. Picasso nous l’a rappelé avec ses beaux dessins de colombes. Toutefois dans l’épisode de la tentation, l’évocation de la colombe ne serait plus de mise. L’heure est carrément un temps de danger dans ce désert grand et redoutable, pays des serpents brûlants, des scorpions et de la soif (Deutéronome 8, 15). Saint Marc fait très bien sentir le défi par la brève allusion aux bêtes sauvages, une menace qui avait déjà effrayé les Israélites dans le désert de l’Exode.

L'union avec le Christ-tête

Saint Paul enseigne que par le baptême, nous sommes incorporés au Christ (Colossiens 1, 18), c’est-à-dire que nous ne formons qu’un corps avec lui. En lisant l’épisode de la tentation, il est opportun de nous le rappeler plus que jamais. Nous lisons ces lignes en nous souvenant que ce que le Christ fait, c’est comme Christ-tête qu’il l’accomplit. Notre sort dépend du sien autant que la destinée de l’armée repose sur les épaules du cavalier au cheval blanc (voir Apocalypse 19, 11) en lice dans une joute décisive.

Des tentations pour les vaincre

Nous savons assurément que dans la réalité quotidienne de la vie, il est impossible d’échapper à la tentation. Une chose demeure certaine, les tentations ne nous arrivent pas pour nous faire tomber; c’est plutôt pour affermir notre vigueur et notre sang-froid. En surmontant la tentation, nous devenons des personnes robustes dans nos cœurs au plus intime de notre être. Les tentations constituent en quelque sorte des mises à l’épreuve dont émergent les lutteurs plus aguerris. Les auteurs chrétiens des origines surnommaient « athlètes de Dieu » les martyrs qui avaient traversé la grande tentation de l’apostasie.

L’évangile de saint Marc ne fait pas que présenter la victoire de Jésus contre les forces adverses. Il insiste en particulier sur la persévérance de Jésus dans ce combat. Le Christ a besoin de ténacité pour affronter Satan et la lutte dure quarante jours. La jonction de la tentation avec le baptême mène le croyant à comprendre d’où vient la force de résistance du Christ. Jésus est en communion parfaite avec son Père, c’est de là qu’il tire sa capacité d’exorciser et d’enseigner, ce qui est raconté un peu plus loin à propos de la synagogue de Capharnaüm. L’unité de Jésus avec le Père correspond à son être profond car il est le Fils. Au baptême la voix du ciel déclare : Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute ma faveur (Marc 1, 11).

Tentations et chutes bien connues

Le disciple, à son tour, tire son énergie spirituelle, selon l’expression de Grégoire Palamas, de son contact avec le Christ. Cela peut arriver à manquer. L’évangile de saint Marc met en relief deux exemples d’échec : celui de saint Pierre et celui de Judas.

Durant la Passion, saint Pierre était dans la cour du palais du grand-prêtre. Une servante qui passait là a dit, et ensuite répété, qu’il était disciple du Nazaréen. Il nia. De même lorsque ceux qui se réchauffaient avec lui près du feu lui ont dit qu’il était Galiléen. Il se mit à jurer avec force imprécations : Je ne connais pas cet homme dont vous parlez (Marc 14, 71). Les gens présents dans la cour du grand prêtre ont joué, peut-être sans le savoir, le rôle de Satan. Alors qu’il était physiquement acculé au mur dans un espace clos, pendant qu’il se sentait spirituellement éloigné de Jésus retenu devant ses juges, Pierre a cédé à la tentation de la lâcheté, du respect humain.

Un autre cas : Judas. Dans Marc, il a entendu les avertissements de Jésus au sujet de l’argent. Dans la parabole du semeur: La séduction de la richesse, explique-t-il, étouffe la Parole comme les épines enserrent la tige verte dans le jardin (Marc 4, 19). La tentation ici, elle est venue de l’avarice et du goût du confort. Judas se fatigue d’une vie dépouillée. Il quitte les disciples qui vivaient d’aumônes. Judas s’éloigne de Jésus. Il va trouver les maîtres du temple qui sont riches. Pour le leur livrer, ils promirent de lui donner de l’argent (Marc 14, 11) Judas est l’exemple absolu de l’engloutissement dans l’argent.

Conversion réussie
Conversion ratée

Saint Pierre, réalisant sa faute éclata en sanglots (Marc 14, 72). Pour Judas, l’affaire est plus difficile car la tentation d’une jouissance individuelle de l’argent affecte profondément la personne. Une sentence pend au-dessus de lui: Malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’homme est livré (Marc 14, 21).

Vivre le radicalisme de l’évangile, surmonter la tentation sous toutes ses formes, tout cela n’est possible qu’en s’unissant à un vainqueur: le Christ.

Par ailleurs, avoir à se décider pour Dieu en rejetant les idoles n’est pas commun comme dans l’Église des origines. C’est exceptionnel. Ce qui est plus fréquent, c’est faire face à une vie encombrée par une multitude d’objets et d’occupations qui en pratique empêchent notre liberté. Ce sont des entraves à l’amour pour Dieu, des « nids-de-poule » qui finissent par ruiner les pneus de la plus solide des voitures.

Le Carême en acte consiste à fuir le péché ou ce qui mène au mal mais c’est surtout une union recherchée avec le monde surnaturel, lieu de présence des saints qui ont déjà vaincu les périls spirituels de la vie. Jésus qui montre de la patience devant les assauts de Satan n’était pas seul : Les anges le servaient. C’est sûrement la même chose pour nous, accompagnés de l’invisible dans nos luttes.

 

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2176. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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