Se faire
accueillant
Le
renoncement du disciple (Matthieu 10, 37-42)
Autres lectures : 2
Rois 4, 8-11.14-16a; Ps 88(89);
Romains
6, 3b-4.8-11
La Bible abonde en enseignements très riches sur l'accueil.
Il s'agit d'exemples concrets et non de dissertations théoriques.
La mémoire chrétienne se souvient immédiatement
d'Élisabeth qui accueille Marie enceinte de Jésus.
La réception se fait dans l'enthousiasme : Bénie
es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein! Et
comment m'est-il donné que la mère de mon Seigneur
vienne à moi? (Luc 1, 42-43) Encore dans l'enfance du
sauveur, la prophétesse Anne, qui appartient au personnel
du Temple, reçoit la Sainte Famille avec des acclamations
joyeuses (Luc
2, 25s).
En poursuivant dans le seul évangile
de Luc, on note encore l'amabilité de Marthe et de Marie.
Toutes les deux veulent accueillir de leur mieux Jésus, le
grand prophète de Galilée. L'une s'intéresse
beaucoup à l'hospitalité matérielle tandis
que l'autre, dans une écoute attentive, tient compagnie à
l'homme de Dieu (cf. Luc
10, 38-42). Jésus s'attend à la bienvenue. C'est
tout à fait dans les murs orientales d'avoir du respect
pour l'hôte qui est personne sacrée. La négligence
de Simon le pharisien qui avait (mal) reçu Jésus dans
sa maison a été compensée par l'amour de la
femme pécheresse : elle a arrosé ses pieds de larmes,
les a couvert de baisers et les a oints de parfum (Luc
7, 44-46).
Le grand principe, Jésus l'énonce
dans l'évangile du jour, extrait de Matthieu : Qui vous
accueille m'accueille, et qui m'accueille, accueille celui qui m'a
envoyé. Qui accueille un prophète en qualité
de prophète recevra une récompense de prophète;
qui accueille un juste en qualité de juste recevra une récompense
de juste. Par ces paroles, Jésus prolonge l'enseignement
traditionnel en Israël. Les Proverbes, pour mieux enseigner
l'hospitalité, plaignent l'étranger : Comme l'oiseau
qui erre loin de son nid, ainsi l'homme qui erre loin de son pays
(Proverbes 27, 8). L'ancêtre d'Israël, Abraham, avait
donné l'exemple en recevant trois étrangers. Il apparaît
dans l'exhortation : N'oubliez pas l'hospitalité, car
c'est grâce à elle que, sans le savoir, d'aucuns ont
hébergé des anges (Hébreux 13, 2). Toutefois,
Jésus va plus loin. Il réclame qu'on l'accueille,
lui, comme l'Envoyé par excellence. Sa venue et sa présence
ont un caractère unique. On pourrait transposer, pour l'accueil,
la révélation qu'il faisait à un disciple :
Philippe! Qui m'a vu a vu le Père (Jean 14, 9).
Les chrétiens sont appelés
« les justes » par Jésus. « Qui accueille
un juste...» S'ils voient venir un prédicateur, surtout
qu'ils le regardent en tant que porte-parole (littéralement
« prophète ») du Père, un peu comme ils
ont vu Jésus. «Sachez accueillir sans avarice ou étroitesse
d'esprit!» C'est vraiment une prévision des problèmes
à venir. Jésus pressent que la foi dans les envoyés
de Dieu connaîtra des crises. Lui qui sait ce qu'il y a dans
le cur de l'homme (Jean
2, 25), il prévoit qu'on s'attachera aux défauts
de ses représentants qui exercent un ministère dans
l'Église. Jésus veut qu'au contraire, on voie leur
dignité. Bien que pécheurs, ils le représentent.
Avec la tradition théologique, on dira même qu'à
l'eucharistie, ils le rendent présent.
Pierre Bougie, bibliste
Professeur au Grand Séminaire de Montréal
Source: Le Feuillet biblique,
no 2020. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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