La parabole
des vignerons
ou l'amour
rejeté
Parabole
des vignerons meurtriers (Matthieu 21, 33-43)
Autres lectures: Isaïe
5, 1-7; Ps 79 (80); Philippiens
4, 6-9
Jésus reprend du prophète Isaïe le thème
de la vigne à la fois choyée par son propriétaire
mais décevante quant à ses fruits. Par rapport à
Isaïe, l'évangile ajoute le rôle des vignerons
à qui Dieu confie sa vigne et réclame des fruits.
La vigne évoque le peuple d'Israël (Isaïe
5, 7). Le maître est Dieu et les vignerons sont les chefs
du peuple. Les serviteurs envoyés successivement par le maître
pour recevoir les fruits sont les prophètes. Et le fils du
maître, c'est Jésus. Hélas! Ce fut la tragédie.
Dieu a confié sa vigne à des vignerons. Dieu leur
a fait confiance.
Mais à une telle marque de
confiance les vignerons n'ont répondu que par l'insolence.
Ils ont voulu se passer de Dieu et gérer la vigne pour leur
profit personnel. Jérémie avait déjà
dit : « Depuis le jour où vos pères sont sortis
d'Egypte jusqu'à aujourd'hui, je vous ai envoyé mes
serviteurs, les prophètes, chaque jour et sans me lasser.
Mais vous n'avez pas écouté » (7,25-26).
Dieu s'obstine à faire confiance
à l'homme. Selon la logique humaine, après avoir été
déçu par les vignerons, le maître ne devrait
prendre la chance d'envoyer son fils. Dieu, lui, risque tout, même
son Fils. Il ose la démarche incroyable: l'incarnation. «
Dieu a tellement aimé le monde qu'il lui a donné son
Fils unique ». Les vignerons reconnaissent en lui l'héritier.
Ils concluent que le maître est mort et que s'ils tuent l'héritier,
la vigne restera en leur possession: le droit palestinien de ce
temps stipulait en effet que l'héritage dont on n'a pas pris
possession dans un certain laps de temps appartient au premier occupant.
Le fils est finalement tué. Jésus s'identifie au «
fils envoyé en dernier, se distinguant nettement des simples
serviteurs » et « par cette parabole, il veut annoncer
d'une façon non voilée sa mort qu'il sent prochaine
» (M.E. Boismard).
Mais en ressuscitant Jésus,
Dieu fait de lui la pierre angulaire de son nouveau peuple, à
qui il confie son Royaume. Dieu a raison. Rien ne résiste
à l'amour. L'amour finit par vaincre la haine, si tenace
soit-elle. Avec nous ou sans nous Dieu poursuit son oeuvre de salut.
Croirons-nous enfin à l'amour?
La foi chrétienne est soumise
aujourd'hui à de nombreux questionnements qui conduisent
à l'option centrale que provoque Jésus. Une face de
l'option est de tuer en Jésus son identité de Fils
de Dieu, en pensant que Dieu lui-même est mort et que désormais,
dans cet univers, l'homme est l'unique possesseur de son héritage.
L'autre face est de reconnaître en Jésus celui qui
parmi nous accueille pleinement l'amour du Père et se lève
comme le premier frère d'un peuple nombreux de pauvres.
Laurent Lafontaine, ptre
Source: Le Feuillet biblique,
no 1896. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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