Le risque
d'être disciple
Renoncer à tout pour suivre Jésus (Lc
14,25-33)
Autres lectures: Sg
9,13-18; Ps 89(90); Ph
,9-17
Jésus énonce trois obstacles qui peuvent empêcher
de devenir son disciple: les liens familiaux (v.26), le refus de
prendre sa croix (v. 27), l'attachement aux richesses (v.33).
A première vue, les exigences posées ici par Jésus
semblent absolues: toujours et partout, il faudrait rompre avec
sa famille, accepter de porter sa croix, se départir de tous
ses biens. Notons cependant que le verbe employé, en chaque
occasion, est au présent, non au futur: il ne peut pas
être mon disciple (et non pas: il ne peut pas devenir
mon disciple). Il ne s'agit donc pas d'une condition préalable
à l'entrée dans la communauté des disciples
mais de quelque chose qui peut se produire dans le cours de la vie
d'un disciple.
Le discours de Jésus se comprend
mieux dans le contexte des persécutions qui ont marqué
la vie des communautés chrétiennes des premières
générations. Jésus lui-même doit faire
face à l'hostilité grandissante des représentants
du judaïsme officiel de son temps et il prépare les
siens à affronter, eux aussi, l'opposition. Prendre la
croix et marcher à la suite de Jésus (v.27), dans
ce contexte, ne signifie pas seulement supporter les contrariétés
de la vie mais accepter, par fidélité à Jésus
et à son message, d'aller comme lui jusqu'au don de sa vie.
La rupture avec la famille est à comprendre dans le même
contexte: il est certain que l'option pour ou contre Jésus
et son évangile a divisé des familles. Pour demeurer
disciple, il faut être prêt à accepter même
la rupture avec les personnes qui nous sont les plus chères.
La troisième condition, l'abandon des biens (v.33), représente
un choix important aux yeux de Luc, qui y insiste beaucoup dans
son évangile. Il est certain qu'en toutes circonstances,
l'attachement aux richesses est un obstacle important sur la voie
du Royaume. Par ailleurs, l'histoire nous apprend qu'une des peines
infligées aux chrétiens fut souvent la confiscation
des biens. Jésus attend de ses disciples qu'ils acceptent
de se laisser dépouiller plutôt que de renoncer à
lui.
Les petites paraboles (v.28-30 et
31-32) peuvent être interprétées de deux manières
différentes. On peut y voir un exemple de prévoyance:
comme le constructeur et le roi guerrier, le disciple doit prévoir
ce qu'il lui en coûtera de suivre Jésus et se demander
s'il est capable d'un tel renoncement. Ou bien, il s'agit d'un exemple
par le contraire: Jésus présente deux personnages
qui calculent longuement leurs ressources et leurs possibilités
alors que le vrai disciple, lui, doit abandonner tous ses biens
(v.33) et faire confiance à la seule richesse qui compte,
celle du Royaume. Que l'on privilégie une lecture ou l'autre,
il s'agit, dans chaque cas, d'une invitation pressante à
vivre le radicalisme de l'engagement à la suite de Jésus.
Jérôme Longtin, ptre
Source: Le Feuillet biblique,
no 1848. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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Des propos de table fort nourrissants!
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